L’herbe gelée crisse sous les pas du Dr Pinchot. Il frappe à la porte de la maisonnette. Marius lui ouvre avec Juliette serrée contre lui. «Comme je passais par chez vous en finissant mes visites, je suis venu voir comment se porte Marie.» «Merci beaucoup, dit, Marius, entrez donc». Le médecin ôte son chapeau de feutre et son lourd pardessus qu’il dépose sur une chaise. «Il fait sacrément bon chez vous», fait-il en fixant son regard sur la cuisinière. «Je charge au maximum le foyer avec du vieux chêne pour que la chaleur circule bien», explique Marius en désignant la porte de la chambre à coucher ouverte. Même moi, la cocotte en fonte noire, je transpire la soupe poireaux-pommes de terre sur le coin de la Godin à côté de la cafetière et de la bouilloire. Marius verse un peu d’eau chaude dans la bassine où le médecin se lave les mains. «Comment ça va ?» demande-t-il en insistant sur ses doigts avec la pierre ponce. «Elle ne se plaint pas mais je sens bien que ce n’est pas facile, souffle Marius. Et puis à part la soupe, elle ne mange rien.» «Je vais voir ça avec elle.»
Lampe à pétrole
Le médecin toque doucement à la porte. «Comment va notre maman ?», dit-il en adoptant une voix enjouée. Marie esquisse un sourire que l’on sent forcé. «Fallait pas vous déplacer docteur, ça va…» Le Dr Pinchot se penche sur elle : «Je vais vous examiner.» Il se retourne vers la cuisine : «Marius, vous pouvez m’approcher la lamp