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Libération
Vu du Royaume-Uni

Héritage sportif des Jeux olympiques : à Londres, un essai non transformé

JO Paris 2024dossier
Les autorités britanniques voulaient «inspirer une génération» à faire du sport dans le sillage des olympiades de 2012. Mais faute d’investissements, les résultats sont peu concluants.
Devant la piscine fermée de Coventry, dans le centre de l'Angleterre, en juin 2021. (Mike Kemp/In Pictures. Getty Images)
par Marie Billon, intérim à Londres
publié le 12 août 2024 à 17h22

Dans l’ex-piscine olympique de Stratford, dans l’est de Londres, les sportifs professionnels s’entraînent dans un bassin pendant que des enfants apprennent à nager dans un autre. «Nous avons de nombreuses écoles qui utilisent nos infrastructures», se réjouit Mark Camley, directeur exécutif des opérations des parcs de la ville. Un atout pour les établissements et les habitants du quartier. Holly Collison-Randall, maîtresse de conférences à l’université de Loughborough, basée à deux pas de ladite piscine, n’en doute pas. Mais hors de la capitale, «rien ne prouve que la participation à des activités sportives a augmenté» chez les enfants ou les adultes après les JO de 2012. Les bonnes volontés et les slogans sont bien beaux, mais ils restent vains s’ils ne sont pas suivis d’actions concrètes, surtout après des années de vaches maigres imposées par les gouvernements conservateurs successifs (2010-2024). «L’austérité a eu un énorme impact sur les services publics, confirme Holly Collison-Randall. L’éducation physique est l’un des domaines les plus négligés. L’activité sportive est vue comme un privilège, un bonus, plutôt qu’un atout pour la santé publique.»

Il est normal, selon l’universitaire, que le gouvernement lance des programmes qu’il passe ensuite au secteur privé. «Certains ont donc une seconde vie, d’autres non.» La natation est l’un des sports les plus abandonnés. Alors que les nageurs britanniques ont fait honneur à leur réputation lors des Jeux de Paris (11 médailles), le nombre de piscines publiques est en déclin. En 2023, l’organisme public Sport England déplorait 382 bassins fermés en treize ans.

En 2012 pourtant, le gouvernement avait mis les moyens notamment dans un programme de financement du sport dans les écoles primaires : 2,2 millions de livres pour former ou embaucher des professeurs d’éducation physique ou faire venir des coachs sportifs dans les établissements. Le programme était à durée limitée. En 2021, des conseillers municipaux ont accusé le gouvernement de «gaspiller l’héritage olympique» par manque d’investissements. Selon The Guardian, le nombre d’éducateurs physiques est passé de 26 005 en 2011 à 23 513 en 2020. Et parfois, un professeur de langues ou même un responsable administratif peut endosser le rôle de prof de gym avec une formation minime.

«L’effet de démonstration» des Jeux a été plus efficace au niveau du sport d’élite. L’agence gouvernementale UK SPORT dont le but est de «continuer à gagner […] et à recevoir des médailles» investit chaque année 100 millions de livres (116 millions d’euros) dans le sport de haut niveau. Le gouvernement a prévu d’investir le même montant sur trois ans – 300 millions de livres entre 2022 et 2025 – dans un «programme d’infrastructures multisports» pour tout le Royaume-Uni. Une somme égale pour une assiette de bénéficiaires potentiels qui compte tous les Britanniques de tous les âges, face à quelques centaines de sportifs qui ont des ambitions professionnelles.