Le chargeur USB-C. Retenez son nom car il deviendra, dès ce samedi 28 décembre, la norme pour tous les appareils mis sur le marché. Tous les fabricants devront se plier à cette loi votée par les eurodéputés il y a un an. Seront concernés les téléphones mobiles, les tablettes, les liseuses électroniques, les écouteurs et casques, les appareils photos numériques, les consoles de jeux vidéo portables et les enceintes portatives, si ces appareils sont rechargeables via un câble filaire. Dans toutes les boîtes fraîchement sorties d’usine après le 28 décembre, il y aura donc systématiquement et uniquement un chargeur USB-C.
En France, charge à l’Agence nationale des fréquences (ANFR) de surveiller la bonne application de la loi, directement au sein des points de vente et non chez les fabricants. «Nous pourrons aussi aller dans les entrepôts pour tout ce qui relève de la vente par correspondance», a précisé Gilles Brégant, directeur général de l’ANFR. Les vendeurs disposeront toutefois d’un délai autorisé concernant les appareils entrés sur le territoire européen avant samedi, le temps d’écouler leurs stocks auprès du public.
Ça vous branche ?
En janvier 2020, une première résolution avait été adoptée au Parlement européen, mais était passée sous les radars car non contraignante pour les fabricants. Fin 2021, la Commission européenne est revenue à la charge avec un projet de directive à Bruxelles, qui a ensuite été adopté le 7 juin 2022 par les 27. «En vertu des nouvelles règles, les consommateurs n’auront plus besoin d’un dispositif et d’un câble de charge différents à chaque fois qu’ils achètent un nouvel appareil, et pourront utiliser un seul chargeur pour tous leurs appareils électroniques portables de petite et moyenne taille», avait stipulé le Parlement européen. Ces appareils «devront être équipés d’un port USB Type-C, quel que soit leur fabricant».
La loi a été votée en octobre 2022 à Strasbourg et le décret publié en décembre 2023, pour une entrée en vigueur fin 2024. Un calendrier pensé de sorte que les fabricants puissent s’adapter. Les ordinateurs neufs seront également concernés, mais d’ici à 2026.
2,4 milliards d’euros de chargeurs par an en Europe
Depuis 2009 déjà, le marché ne comptait plus que trois types de câbles, contre une trentaine auparavant : le micro-USB, le Lightning pour Apple et l’USB-C. Selon une étude de la Commission européenne publiée en 2020, 29 % des téléphones portables dans l’UE étaient équipés en USB-C et 21 % en Lightning.
Apple a été le seul fabricant à s’opposer farouchement au modèle du chargeur unique. Ne voulant renoncer à sa technologie Lightning, qui équipe plus d’un milliard d’appareils, le géant américain avait affirmé devant le Parlement qu’une telle réglementation pouvait «étouffer l’innovation» et «nuire aux consommateurs». Néanmoins, Apple s’est plié au jeu et, le 12 septembre 2023, le géant a présenté l’IPhone 15, son tout dernier smartphone d’alors, muni d’un port et d’un câble USB-C.
Le commissaire européen au Marché intérieur avait salué cette décision : «Le chargeur commun relève du bon sens, et il est à portée de main […], il réduit les coûts et c’est bon pour l’environnement.» Au total, près de 250 millions d’euros seront économisés annuellement par les consommateurs européens, qui dépensent environ 2,4 milliards d’euros chaque année pour des achats de chargeurs, selon la Commission européenne, qui ajoute que ce dispositif permet également de réduire la part de déchets électroniques qui s’élèvent à près de 11 000 tonnes par an dans l’UE. D’après la même source, près d’1 000 de tonnes de déchets seront économisées chaque année.
Quid des appareils reconditionnés ?
Le décret et l’arrêté publiés en décembre 2023 expliquent que tous les appareils «mis sur le marché» en Europe dès le 28 décembre 2024 devront respecter la politique du chargeur unique USB-C. Si les appareils reconditionnés sont également concernés, quelques exceptions sont possibles. Interrogé par Numerama ce 23 décembre, le ministère de l’Economie et des Finances a précisé que «si un smartphone reconditionné n’est pas muni d’un port USB-C, mais a déjà eu une première vie dans un des pays de l’UE avant le 28 décembre 2024, il pourra toujours être vendu dans l’UE». Mais aucune dérogation n’a été précisée concernant les appareils qui ont déjà eu une première vie hors UE avant le 28 décembre, puis reconditionnés et mis sur le marché européen.
A ce propos, Eric Bothorel, député Renaissance de la 5e circonscription des Côtes-d’Armor, avait interrogé le gouvernement à deux reprises. Une première fois, en mai 2024, le député avait déploré «des nouvelles règles [qui] entraveront considérablement la viabilité économique des reconditionneurs, alors que le secteur du reconditionné devrait plutôt être soutenu, pour des raisons à la fois économiques et écologiques». Il avait alors demandé à l’exécutif de proposer plusieurs solutions à apporter au marché de la seconde main, «tout en respectant l’esprit de la directive». Eric Bothorel avait rappelé que «pour certains reconditionneurs [les appareils importés hors UE] concernent plus de 60 % des appareils commercialisés dans l’Union européenne».
Mais près d’un mois plus tard, l’Assemblée nationale a été dissoute. Le député, réélu dans la foulée, a de nouveau interrogé l’exécutif sur le sujet le 2 décembre. Manque de chance, le gouvernement Barnier a été censuré et, depuis, sa question est restée en suspens.