Un soir d’automne, en banlieue parisienne. On est invitée à dîner chez Anna et sa compagne pour rencontrer leur chien et découvrir leur maison. Lorsque l’on s’approche pour faire la bise à la première, celle-ci recule : elle explique avoir décidé de ne plus se soumettre à ce rituel. Franchement, sur le coup, on est un peu vexée, même si l’on sent bien que notre réaction est idiote. Après tout, Anna n’est pas obligée d’avoir envie que tout le monde la touche, d’autant plus qu’on a tendance à accompagner nos bises d’une main sur l’épaule, quand d’autres préfèrent la hanche. Tout de même, on se sent confusément un peu rejetée. Pourquoi a-t-on cette sensation, alors qu’il y a encore quelques années, durant le Covid, on s’était assez bien accommodée de la suspension de la bise ? Si, au moment de la crise sanitaire, les Français avaient assuré – promis, juré, (pas) craché – qu’ils ne feraient plus jamais la bise, même une fois l’épidémie passée, la pratique est depuis remontée en flèche. Mais certains, peu nombreux et bien décidés à ne pas céder, résistent toujours, remisant la bise aux oubliettes de l’histoire des pratiques sociales.
«Spécialité française»
«La fonction de la bise dans notre société, c’est un rituel de salutation, explique Dominique Picard, psychosociologue et professeure en psychologie, autrice de Politesse, savoir-vivre et relations sociales (dans la collection Que sais-je ?), qui vient d’être réédité pour la septième édition. Les rituels de salutation servent à la foi