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Etude

Le cyberconsentement, horizon lointain pour les ados britanniques

Selon une étude détaillée dans le «Guardian», les jeunes ne prennent pas la peine de signaler les contenus sexuels reçus sans consentement sur les médias sociaux. La faute aux politiques de modération qui, selon eux, n’auraient que peu d’impact.
D'après l'étude, une fille sur quatre reçoit du contenu sexuel sur les réseaux sociaux sans l’avoir sollicité. (AlessandroPhoto/Getty Images)
publié le 7 décembre 2021 à 9h01

Signaler les contenus sexuellement explicites envoyés inopinément sur les réseaux sociaux ? Cela ne sert pas à grand-chose. Ce sont des adolescents britanniques qui le disent, déplore le Guardian. Une étude menée auprès de 480 d’entre eux, âgés de 12 à 18 ans, par des chercheurs des universités College London et du Kent révèle qu’une fille sur quatre reçoit du contenu sexuel sur les réseaux sociaux sans l’avoir sollicité, notamment l’envoi d’images représentant les parties génitales, communément appelées dick pics. Et cela, de la part d’hommes adultes dont certains n’hésitent pas à créer de faux comptes en mentant sur leur âge, c’est le grooming. Une forme de violence sexuelle qui a également son nom : le cyberflashing. Elle entre dans le cadre du cyberharcèlement et pose l’enjeu du consentement sur Instagram, Snapchat, Facebook et consorts.

Un ado français sur 10 victime de cyberharcèlement

Plus de la moitié des jeunes interrogés dans l’étude ne font rien ou pas grand-chose quand ils sont victimes de cyberflashing, reprend le Guardian : si 25 % d’entre eux en parlent à leurs amis, ils sont seulement 5 % à évoquer le sujet avec leurs parents et 2 % à s’en plaindre auprès de leur établissement scolaire. Ces chiffres, affolants, montrent à quel point les géants du Net peinent, malgré leurs stratégies de modération, à bannir de leurs espaces harceleurs et pédocriminels. A l’instar de ses concurrents, Meta (anciennement Facebook) promet, depuis des années, monts et merveilles pour lutter contre ces pratiques. Il y a une décennie déjà, sur le site de tchat vidéo Chatroulette, les pénis en érection circulaient à l’envi. Aujourd’hui, s’agissant de la lutte contre le phénomène, Meta parle de «priorité», Snapchat évoque «des outils prochainement mis en place», etc. En attendant, le même Meta planche sur une version d’Instagram pour les moins de 13 ans sans pouvoir donner un semblant d’informations quant à la future politique de modération…

Ce phénomène néfaste ne s’arrête évidemment pas aux frontières de la Grande-Bretagne. S’il est acté que s’envoyer des nudes fait partie des premiers émois sexuels des ados (malgré les risques de revenge porn), les questions liées au cyberconsentement sur les réseaux sociaux agitent aussi en France. En témoignent les campagnes de sensibilisation, les études, les alertes des spécialistes de la cybersécurité… Selon l’association e-Enfance, qui œuvre depuis quinze ans pour la protection de l’enfance sur Internet en France, 63 % des 8 à 18 ans sont inscrits sur les réseaux sociaux et un ado sur 10 a déjà été victime de cyberharcèlement…

En France, envoyer une dick pick est considéré comme de l’exhibitionnisme et passible d’un an d’emprisonnement, et jusqu’à 15 000 euros d’amende (trois ans de prison et 45 000 euros d’amende lorsque la victime est mineure). Sur Instagram, un jeune homme trans, Léorose, 29 ans, fait de la prévention contre les cyberviolences sexuelles grâce à son compte aux plus de 45 000 abonnés baptisé @no.dick.pick. Son objectif : informer les victimes qui sont encore trop rares à connaître leurs droits. Alors, comment protéger les moins de 20 ans sur les réseaux sociaux au-delà de la prévention ? La question reste entière face à ce cyberbazar.