On avait quitté Terry Richardson en 2017 «cancelled» par une grande partie du milieu de la mode. On reprochait au photographe, l’un des plus demandés du circuit, son comportement lors de ses shootings photo. Il avait été accusé par plusieurs modèles d’agressions sexuelles et de faire planer une atmosphère hypersexualisée favorisant les comportements problématiques. Le groupe Condé Nast, propriétaire des magazines Vogue, AD et GQ, avait alors fait savoir qu’il mettait fin à toutes ses collaborations avec Richardson. De nombreuses marques qui avaient l’habitude de faire appel au New-Yorkais ont fait de même.

Minerva Portillo, mannequin espagnole alors basée aux Etats-Unis, avait raconté à l’époque que Richardson l’avait agressée lors d’une séance photo dans son studio de Manhattan. Selon la jeune femme, 22 ans au moment des faits, le photographe l’aurait rejoint alors qu’elle posait seins nus, aurait pris la pose avec elle, puis touché ses seins et pressé son sexe contre son corps. Richardson aurait enfoncé son sexe dans la bouche de la mannequin alors que ses assistants continuaient de la photographier.

La jeune femme a déposé plainte mardi 21 novembre en vertu de la loi new-yorkaise dite «Adult Survivors Act», qui offre aux victimes un délai d’un an pour intenter une action au civil, même si les délais de prescription de leur affaire sont dépassés, et qui s’achève ce 25 novembre à minuit, heure de New York, contre le photographe et son ancienne agence, Trump Model Management, pour ne pas avoir entendu ses craintes et lui avoir tout de même conseillé de se rendre à la séance de travail avec le photographe, star à l’époque. Minerva Portillo explique qu’elle avait rencontré Terry Richardson une première fois, avant la séance photo, et qu’il ne portait alors qu’un peignoir. Elle se serait inquiétée de son comportement auprès de ses agents (employés de l’agence de mannequins fondée par Donald Trump en 1999 et fermée en 2017) qui lui auraient rétorqué «qu’étant donné la notoriété et l’influence de M. Richardson dans l’industrie, Mme Portillo devrait ignorer son comportement», indique sa plainte civile, comme la cite un article du New York Times. Elle ajoute que des employés du photographe lui auraient servi une boisson à son arrivée qui lui a donné «des vertiges et fait perdre le contrôle de son corps», suspectant l’équipe de l’avoir droguée.

Une autre femme a déposé plainte jeudi 23 novembre contre Terry Richardson pour des faits remontant à 2003, a appris USA Today. Caron Bernstein, ancienne actrice et mannequin née en Afrique du Sud, a témoigné avoir été «attirée» au studio du photographe où il «l’a agressée sexuellement, sans son consentement explicite ou implicite, en tenant la tête de Bernstein et en forçant le pénis en érection de Richardson à entrer et sortir de sa bouche à plusieurs reprises, puis en éjaculant son sperme sur son cou, sa poitrine et ses seins», est-il mentionné dans la plainte. Des faits qui constituent un viol en droit français. Selon l’un des avocats de la plaignante, Albert J. Santoro, l’ancien mannequin aurait décidé de porté plainte après avoir lu le témoignage de Minerva Portillo. Elle dit s’être sentie «inspirée par le courage et la bravoure de Portillo» et veut «se tenir aux côtés des autres victimes». Carolin Guentert, l’avocate de Minerva Portillo, a par ailleurs précisé à Libération que «M. Richardson a déjà été poursuivi par deux autres mannequins : Gabriela Johansson et Frank Lopera [mentionnées dans la plainte, ndlr].»

Le goût de Terry Richardson pour la nudité et ses mises en scène provocantes ont en partie fait son succès à partir du début des années 90 jusqu’aux accusations d’agressions sexuelles. Le photographe vit aujourd’hui à l’écart du monde aux Etats-Unis, avec sa femme et leurs enfants, et refuse de répondre aux interviews.