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Fashion Week

Défilés haute couture: la belle assiette de Chanel

Présentée ce mardi à Paris dans le sillage de Charlotte Casiraghi, ambassadrice maison et cavalière émérite qui a ouvert le show à cheval, la collection haute couture printemps-été 2022 conjugue confort, raffinement et délicatesse.
On perçoit le travail des orfèvres de 19M. (Chanel)
publié le 25 janvier 2022 à 19h26

C’est entendu : en mode, qui dit cheval dit spontanément Hermès, maison dont le fondateur était maître artisan harnacheur sellier et qui est toujours restée fidèle à l’univers équestre. Mais Charlotte Casiraghi, ambassadrice Chanel, est une cavalière émérite (d’ailleurs précédemment l’égérie de la ligne hippique de la marque italienne Gucci), donc la voir prendre les rênes pour un défilé, pourquoi pas. Ce mardi, au Grand Palais éphémère, dans le VIIe arrondissement, cela a commencé par une vidéo où on la voit à l’entraînement. Mais soudain, la voilà qui surgit en chair et en os sur un grand cheval noir. Sous les regards épatés de l’assistance, le duo trotte sur le podium, une piste de sable qui serpente au cœur du décor-installation conçu (comme la vidéo) par le plasticien Xavier Veilhan, puis il sort au galop.

Le moment, qui fait illico le tour des réseaux sociaux, est raccord avec la geste spectaculaire de feu Karl Lagerfeld. Mais dans l’équitation, le calme et la stabilité sont décisifs, cette fameuse «assiette» du cavalier, et ils caractérisent la collection elle-même, tout comme le très beau décor aux échos à la fois constructivistes et oniriques, qui évoque la carrière d’équitation autant que le minigolf, où deux zeppelins surplombent l’assistance. Tout ce vestiaire de Virginie Viard invite au mouvement, à commencer par les tailleurs-pantalons, en tweed bien sûr, avec leurs grandes fentes latérales (mention aux bleus), et les tailleurs jupes dont le boutonnage s’arrête assez haut sur la cuisse pour de grandes enjambées.

Mais même les pièces les plus délicates ne suggèrent pas de lever le pied, ces grandes jupes en dentelle ou richement rebrodées, ou les robes du soir (princesse, fourreau...) d’une légèreté et d’une ampleur dosées pour ne pas entraver. Les couleurs sont tempérées, crème, blanc, gris, roses, bleus, même le noir n’est pas sévère. Plumes, strass, paillettes, boutons bijoux, transparences : on perçoit le travail des orfèvres du 19M, sans le côté pièce montée. Et l’ultraféminité (des volants, des nœuds) est tempérée par le tranchant des asymétries. Le show s’achève sur une mariée limpide et grave, qui avance un bouquet bleu nuit entre les mains, en hommage à l’acteur Gaspard Ulliel, autre ambassadeur maison, mort la semaine dernière.