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Libération
Du cœur à l'ouvrage (5/5)

Florentin Glémarec et Kevin Nompeix, l’amour est dans l’apprêt

Diplômé en stylisme, le couple s’est rencontré lors d’un casting. Trois ans après avoir lancé leur griffe EgonLab, dont la dernière collection a défilé à la Fashion Week en janvier, ils aimeraient développer un label de musique.
Kevin Nompeix et Florentin Glémarec ont fondé Egonlab en 2019. (DR)
publié le 14 février 2023 à 12h05

Ils s’aiment et travaillent ensemble. En ce jour de Saint-Valentin, des couples qui font équipe racontent à Libération comment ils conjuguent des vies personnelles et professionnelles enlacées.

Ils puisent leur inspiration commune dans les codes punk à la Vivienne Westwood, créatrice à laquelle ils ont rendu hommage dans leur dernière collection, la septième, lors de la Fashion Week fin janvier. Pas encore trentenaires, Florentin Glémarec (27 ans) et Kevin Nompeix (29 ans), silhouettes longilignes, forment depuis 2019 l’un des jeunes duos créatifs les plus en vue des podiums parisiens avec leur marque de mode masculine EgonLab. Le premier, parisien, a été modèle un temps signé chez M Management, après être passé quelques mois par l’Atelier Chardon Savard (une école de stylisme, à Paris) ; le deuxième est styliste, diplômé en sémiologie de la mode et originaire de Bordeaux. Les deux designers, en couple, ont ainsi très vite gagné en visibilité depuis le lancement de leur griffe, un an tout pile avant la pandémie de Covid-19. Au point d’habiller les stars (Harry Styles, lors des derniers Grammys, Angèle plus près de chez nous), de multiplier les récompenses (le prix Pierre Bergé de l’Association nationale pour le développement des arts de la mode, notamment) et les collabs avec des marques sportswear Sergio Tacchini (juillet 2020), Asics (janvier 2021) ou Crocs (janvier 2022).

La rencontre : «C’était assez naturel»

Kevin : «L’industrie de la mode est un monde difficile à pénétrer. Alors quand j’ai emménagé à Paris, après mes études, j’ai d’abord approché une agence de mannequins, Success models, pour devenir booker. Un jour, Florentin s’est présenté pour un casting. Il avait déjà lancé sa marque avec son frère et je voulais créer la mienne. Donc j’en ai profité pour lui poser quelques questions. C’est comme ça qu’on a commencé à se côtoyer et qu’on a progressivement envisagé de lancer la nôtre. C’était en 2019, juste avant le Covid. Et, à force de travailler ensemble, on a tissé des liens et on a décidé de se mettre ensemble. C’était assez naturel.»

Les débuts : «On était contents de s’épauler»

Florentin : «La création de l’entreprise, ce n’était pas le plus fun (rires). On a d’abord travaillé sur l’identité de la marque, ce qu’on voulait transmettre, son ADN assez punk et très tailoring. Ça a donné une première collection, l’Appel, puis une autre, etc.»

Kevin : «Construire seul une marque dans cette industrie, c’est très compliqué. On était plutôt contents de s’épauler. On a officiellement lancé nos premières collections en plein confinement. On était enfermés dans 18m2 à deux, c’était assez spécial mais un joli défi. On se veut une marque sociétale qui envoie un message engagé [sur l’environnement, l’inclusion et la diversité, ndlr] à notre génération, et même si on n’avait pas un accès direct aux gens, on a très vite engrangé une communauté fidèle.»

Le partage des tâches : «On dessine à quatre mains»

Kevin : «On s’est très vite rendu compte qu’on était complémentaires. Florentin est plus porté sur le patronage et le suivi de la fabrication, moi sur le développement de l’image de marque et la communication. Il y a toujours des hauts et des bas, mais on a cette facilité de chacun passer d’un domaine à un autre. Ça nous permet de maintenir un équilibre et c’est ce qui fait notre force.»

Florentin : «On dessine toujours à quatre mains dans notre studio rue Amelot (XIe arrondissement de Paris) où l’on vit désormais. Ensuite, on fait des sélections qu’on décline en plusieurs silhouettes. Chacun prend le dessin de l’autre et repasse par-dessus jusqu’à trouver la silhouette qui nous intéresse pour la collection. On fait ensuite une déclinaison des vêtements et une pièce d’étude. Tous les prints sont faits au studio et ensuite ça part en usine d’assemblage, du prototype au produit fini.»

Les difficultés : «On s’engueule rarement»

Kevin : «On a évidemment des conflits et des petites frictions mais c’est dans ces moments-là qu’on sort les meilleures idées. Ça a du bon d’avoir des discussions animées : on ne se repose pas sur nos lauriers. C’est justement parce qu’on était pas d’accord sur des silhouettes “féminines” pour nos défilés de couture qu’on a poussé le côté genderless des collections, le fait d’habiller l’homme avec des looks plus féminins, et qu’on s’est libérés d’une certaine stigmatisation. Aujourd’hui, c’est vraiment le discours qu’on a envie de défendre.»

Florentin : «En fait, on s’engueule assez rarement. C’est un projet qu’on a fait naître ensemble, on défend les mêmes valeurs et on arrive à dissocier notre vie professionnelle de notre vie personnelle. Tout est assez fluide entre nous. Ce qui fait qu’une dispute de boulot revient aussi à la maison. Mais c’est pareil pour tous les couples, non ? Ce serait idyllique de penser et de dire que tout est toujours limpide.»

L’avenir : «Faire une montée en gamme»

Kevin : «Je ne vois pas la marque sans Florentin et vice-versa. C’est vraiment un enfant, le nôtre, qu’on a envie de voir grandir. Depuis la saison dernière, on a d’ailleurs décidé de faire une montée en gamme en développant un label de musique [avec le producteur italodisco Pablo Bozzi, ndlr], les NFT dans le métavers et tous les produits dérivés des vêtements (accessoires, goodies, etc). On ne se conçoit plus seulement comme une marque de mode mais une marque lifestyle.»