Le départ d’Hedi Slimane bruissait depuis des mois bien au delà des couloirs de la maison Celine. Encore fallait-il savoir quand le groupe LVMH l’annoncerait. C’est chose faite depuis ce mercredi 2 octobre, au lendemain de la Semaine de la mode parisienne (printemps été 2025) et d’âpres négociations qui auront durées des mois. Le créateur français abandonne ainsi les rênes de la marque après sept ans de service au cours desquels il aura modifié son nom – Celine plutôt que Céline – et opéré un changement radical à tous les niveaux qui a finalement très bien fonctionné : le chiffre d’affaires de la maison était estimé à son arrivée entre 700 et 800 millions d’euros, et il est aujourd’hui autour de 2,5 milliards d’euros selon un analyste financier.

Cette réussite est due au style qu’a insufflé le créateur 56 ans. Il a marié l’esthétique d’une certaine bourgeoisie à la française à des codes issues de la rue avec le culte du logo comme point central dans ses collections femmes, et a rendu un hommage constant à la culture rock pour sa garde-robe masculine. Slimane a su avant tous les autres attirer à lui des stars de la K pop comme Lisa des Blackpink qui ont aidé la griffe à vendre des flopées d’accessoires dont des sacs très efficaces en Asie. Autant d’éléments qui ont permis, contre toute attente, de faire un peu oublier l’ère de la désormais culte Phoebe Philo, qui créa pour «Céline» une allure cérébrale et sophistiquée de 2008 à 2018. LVMH a souligné dans un communiqué que «la vision holistique d’Hedi Slimane, son exigence et sa rigueur, ont permis de redessiner les codes de Celine tout en réaffirmant son ancrage féminin et parisien. Il a également remarquablement enrichi les territoires d’expression de la maison à la silhouette masculine, à la couture et à la haute parfumerie. Le chemin extraordinaire parcouru ensemble ces sept dernières années fait de Celine une maison aux formidables fondations pour l’avenir.»

Depuis sont arrivée en 2018, Hedi Slimane est resté le créateur protégé de Bernard Arnault qui lui a permis de ne plus défiler après le Covid, acceptant que ses collections soient dévoilées dans des films qu’il réalisait lui-même, comme les campagnes qu’il photographiait, son autre grande passion. Le milliardaire a aussi toléré qu’il boude Anna Wintour et l’ensemble des éditions de Vogue que celle-ci supervise au sein du groupe Condé Nast. Le départ d’Hedi Slimane et l’annonce quasi simultanée de son successeur vient clore un long chapitre pour les deux hommes.

Le nouveau directeur artistique de Celine, Michael Rider, est inconnu du grand public mais est un designer respecté dans l’industrie, connu pour son grand calme. L’américain d’une quarantaine d’années a longtemps œuvré chez Céline où il a gravi tous les échelons jusqu’à devenir le bras droit de Phoebe Philo. Il avait débuté auprès de Nicolas Ghesquière chez Balenciaga et vient de quitter la marque Polo Ralph Lauren pour revenir travailler à Paris.

L’ensemble du milieu de la mode s’interroge aujourd’hui sur le futur d’Hedi Slimane. Une rumeur le disait dans la short list pour prendre la tête de la maison Chanel qui pourrait annoncer le nom de son nouveau directeur artistique (ou de sa nouvelle directrice) le 15 octobre prochain. Mais Bruno Pavlovsky, président des activités mode et des Métiers d’Art de Chanel, a assuré ce mercredi dans le Women’s Wear Daily vouloir prendre son temps et ne pas forcément miser sur un nom célèbre. Hedi Slimane, lui, a la stature du poste et toute liberté à présent.