Des ventes toujours plus exponentielles (le chiffre d’affaires de la marque a doublé au cours des trois dernières années, pour atteindre 1,24 milliard de dollars, soit 1,18 milliard d’euros) ; un engouement transgénérationnel quand on aurait pu la croire privilégiée par les seniors adeptes du confort (près de la moitié de ses ventes de 2022 ont été effectuées par des acheteurs âgés de 20 à 30 ans) ; et ce coup marketing qui tourne au jackpot (avec ruptures de stock) : le partenariat avec le film Barbie, où les sandales en liège portées par Margot Robbie contribuent à l’émancipation de la poupée blonde dans le monde réel. Ces derniers temps, les bonnes nouvelles s’empilent pour Birkenstock, marque allemande de chaussures orthopédiques créée en 1774 – à l’origine un business de semelles – dont la «hype» perdure au plus grand étonnement de certains, qui y voient un totem de la «mode du moche».
Mais un caillou vient de se glisser dans la fameuse sandale. Mercredi, la marque (propriété de L Catterton, fonds détenu par le groupe LVMH de Bernard Arnault) a raté son entrée à la Bourse de New York : l’action au symbole boursier BIRK a conclu en chute de 12,6 %, à 40,20 dollars par rapport à son prix d’introduction de 46 dollars, à l’issue de sa première journée de cotation. Et le lendemain, elle a chuté de 6,6 %, à 37,55 dollars, soit une baisse de 18,4 % par rapport au prix d’introduction.
Un contexte défavorable au secteur de l’habillement
Cette entrée en Bourse était censée constituer une consécration de la notoriété de la marque en même temps qu’elle indiquait une volonté de déploiement supplémentaire grâce, précisément, à la levée de fonds. Ce revers suggère une désirabilité moins solide qu’attendu, un «buzz» pas si fiable que ça, qui se heurte au réel. De quoi, peut-être, doucher un brin le triomphalisme du PDG de Birkenstock. Dans une interview accordée en janvier, Oliver Reichert se rengorgeait : «Nous avons créé un business model parfait. Dès que nous sortons un produit, il est en rupture de stock. Parvenir à vendre des sandales pour 120 euros a vraiment quelque chose de magique.» La magie peut même monter à bien plus, quand il s’agit de modèles conçus en partenariat avec des marques de luxe (Manolo Blahnik, Jil Sander, Valentino, Rick Owens, Dior…), dans le cadre la collection 1774.
Reste à voir si ce revers se confirmera. Depuis plusieurs années maintenant, le contexte n’est pas favorable aux secteurs de l’habillement et de la chaussure, et la conjoncture internationale tend à encourager la frilosité des consommateurs mais aussi celle des investisseurs. Birkenstock a cependant déjà amplement prouvé qu’elle en avait sous la semelle, à rebours de bien des tendances.