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Obligation du casque à vélo: une proposition de loi à freiner?

Vélodossier
Remise au menu des discussions par des sénateurs centristes, cette mesure n’est pas vue d’un très bon œil par les promoteurs du vélo en ville, qui la jugent au mieux inefficace, au pire contreproductive.
S'il est vrai que le casque offre une protection extrêmement efficace contre les traumatismes crâniens, les cyclistes casqués sont, eux, surreprésentés dans les statistiques des accidents. (Cyril Zannettacci/Libération)
publié le 12 janvier 2022 à 12h20
(mis à jour le 14 janvier 2022 à 9h34)

Revoilà l’idée par la voie parlementaire. Jeudi, l’obligation de porter un casque à vélo – et sur tout autre véhicule à «une ou plusieurs roues à moteur ou à assistance électrique» – sera au menu des discussions sénatoriales. A l’origine de la proposition de loi, qui prévoit une contravention de 135 euros pour les récalcitrants, des sénateurs centristes soucieux de «renforcer la sécurité des cyclistes modernes, sans considération de leur âge». En effet, à l’heure actuelle, seuls les moins de 12 ans doivent impérativement être équipés d’un casque lorsqu’ils ont le nez dans le guidon ou sont passagers de leurs géniteurs. Alors pourquoi ne pas étendre l’obligation aux cyclistes adultes et adolescents (comme en Australie depuis trente ans) pour éviter des drames – 178 cyclistes sont morts sur les routes en 2020, un chiffre stable malgré la hausse des déplacements citadins à vélo.

«Un phénomène de compensation consciente du risque»

Le bon sens, diront certains, dicte d’imposer cet équipement à tous et toutes – comme ce fut le cas pour les motocyclistes en 1973. Une mesure à laquelle s’opposent pourtant les promoteurs de la bicyclette en ville. Car, s’il est vrai que le casque offre une protection extrêmement efficace contre les traumatismes crâniens, les cyclistes casqués sont, eux, surreprésentés dans les statistiques des accidents. Deux explications comportementales à cela, selon une étude de juin : d’une part, «un phénomène de compensation consciente du risque» chez les casqués (soit une plus grande prise de risque conduisant à des accidents impliquant d’autres organes) ; d’autre part, un «phénomène d’indifférence au risque du fait de porter un casque» (soit une perte de vigilance en raison du sentiment de sécurité conféré).

Mieux vaudrait un discours de prévention

La contrainte, imposée, pourrait en outre engendrer une baisse de la pratique – dont le bénéfice à long terme est «vingt fois supérieur au risque» (pour le climat ou la santé publique). Or, on présume que moins il y a de cyclistes, plus les effets positifs de la «sécurité par le nombre» tendent à s’atténuer en matière d’accidentologie. Résultat : la mesure serait au mieux inefficace, au pire contreproductive. Mieux vaudrait donc un discours de prévention des accidents plus global (sur le matériel à revêtir ou les comportements les plus à risque) et la sécurisation des infrastructures cyclables. Mais tout cela demande aussi des moyens.

Mise à jour le 14 janvier après le retrait du projet de loi, son rapporteur soulignant que la mesure était «nature réglementaire» et non du domaine de la loi.