Le post date du 3 septembre. Une série d’extraits vidéos habituels de sa façon d’être sur Instagram : Britney Spears défile, face caméra, dans plusieurs tenues, minishort en jean et blouse, minishort et torse nu (couvert par ses cheveux), puis culotte et torse nu (couvert par un chapeau). Un texte, de la chanteuse, les accompagne. Il est lui aussi typique, tout en spontanéité sans filtre : «GEEEZ tu vois, ça me frappe à retardement… le fait que je fasse une chanson avec Elton… ça me donne envie de pleurer… C’est notre musicien préféré, à moi et ma mère… […] Wow wow, quel honneur d’être entre des mains aussi douées ! !! ON LE SAIT DÉJÀ ! !! Mon fils pourrait lui donner du fil à retordre !!! …. J’ai teeeeeellement d’images de lui en train de jouer… Ouais mes enfants sont des génies ! ! C’est un peu effrayant… il a arrêté de me voir… J’ai posté quelque chose de lui, mais il s’est vraiment mis en colère alors malheureusement, je n’ai pas pu faire de posts de ma famille aimante… de toute façon, je suis désolée les enfants, je continue à être présente sur les réseaux sociaux… Je suis désolée que vous pensiez que je le fais pour attirer l’attention… Je suis désolée de ce que vous ressentez… mais devinez quoi ? ??? J’ai des nouvelles pour vous… Je suis un enfant de Dieu comme nous le sommes tous aux yeux de Dieu… alors NON, je ne suis pas désolée… J’ai appris à LE dire !!!». L’ensemble laissera sans doute perplexe le non-abonné à la chanteuse américaine. Ses (42,1 millions de) followers en revanche, auront immédiatement compris : c’est reparti pour un nouvel épisode de déchirement familial, cette fois entre Britney Spears et ses enfants.
Etats-Unis
Rappelons que Britney Spears, 40 ans, est une rescapée de la tutelle imposée par son père pendant treize ans, de 2008 à 2021. Sa victoire devant un tribunal de Los Angeles a été saluée à travers le monde, à commencer par ses fans mobilisés autour du hashtag #FreeBritney. Depuis, la pop star rappelle régulièrement les dommages entraînés par cette mise sous tutelle abusive et accuse sa famille et ses proches de l’avoir «littéralement tuée». Son activité sur Instagram, qui permet de tout connaître de son quotidien (séance de sport, chorégraphie, vacances, noces, mari – le mannequin, acteur et coach sportif Sam Asghari –, chien, chat, fleurs, paysages, messages…) les confirme. On entrevoit un grand huit émotionnel, mix de volonté de se reconstruire, d’euphorie de s’exprimer librement quand il lui a été interdit de le faire pendant plus d’une décennie, et de grands moments de désarroi. Ces épisodes-là sont notamment alimentés par sa relation avec ses enfants.
«Attirer l’attention»
Britney Spears a deux fils, nés de sa précédente union avec le chanteur et danseur Kevin Federline, de 2004 à 2007. Sean Preston Federline et Jayden James Federline vivent chez leur père : il a obtenu leur garde exclusive lors du divorce, avec versement d’une pension alimentaire mensuelle de 20 000 dollars par Britney Spears. En 2019, la justice a réévalué la situation et accordé 30 % de la garde à la chanteuse. Mais il s’avère que depuis quelques mois, les deux garçons, désormais de 16 et 15 ans, refusent de voir leur mère. Selon leur père, qui s’est exprimé en août dans une interview à la chaîne britannique ITV, ce boycott résulterait de la surexposition de Britney Spears, et plus particulièrement ses selfies dénudée. Des propos du cadet, Jayden, confirment ces dires. Tout en réaffirmant son désir de renouer avec sa mère, l’adolescent cible clairement son activité sur le réseau social : «C’est presque comme si elle devait mettre quelque chose sur Instagram pour attirer l’attention. Cela dure depuis des années et des années et des années, et il y a de fortes chances que cela ne s’arrête jamais vraiment, mais j’espère pour moi, peut-être qu’elle le fera.»
C’est le monde à l’envers, non ? Un enfant qui demande à son parent d’être plus discret sur les réseaux sociaux… Jayden Federline tente en somme un contrôle filial, à une époque où il est constamment question de contrôle parental. Mais il s’agit alors de protéger les enfants d’une exposition à des contenus inadaptés ou d’une surexposition à risques – harcèlement, pédophilie… Là, Jayden Federline exprime plutôt une gêne vis-à-vis de ce qu’il perçoit comme une quête de lumière ad libitum de sa mère.
Ascenseur émotionnel
De fait, même le quidam peut s’interroger sur l’activité de Britney Spears sur les réseaux sociaux. Cette façon de danser façon derviche tourneur, ces défilés avec une prédilection pour le short baissé au niveau du pubis et les seins pris dans ses mains, ces mimiques… Si ses fans souvent acclament, les commentaires dubitatifs voire inquiets (pour la santé mentale de la chanteuse) abondent aussi. Et il est recevable que cela soit particulièrement embarrassant pour ses enfants, sachant que la surface médiatique de Britney Spears implique un écho mondial auquel il leur est difficile d’échapper. Quant au refus de Jayden Federline de se retrouver «posté» par sa mère, il n’est pas si extraordinaire : les cas d’enfants opposés à l’utilisation de leur image sur les réseaux sociaux par leurs géniteurs ne sont pas isolés, telle Sonia Bokhari, Américaine de 13 ans qui en a fait publiquement le reproche à sa mère et sa sœur – alors qu’elle-même a été interdite de réseaux sociaux jusqu’à 13 ans… En Autriche, une jeune femme a même poursuivi en justice ses parents pour des photos publiées sur Facebook qu’elle jugeait humiliantes et qu’ils refusaient de supprimer.
Britney Spears a donc répondu à ses fils, par une fin de non-recevoir qui résonne comme une réaffirmation de sa liberté retrouvée. Ce lundi, elle a posté (avant de le supprimer) un message audio de trois minutes poignant où elle se dit désormais athée car «Dieu n’aurait pas [permis] que cela m’arrive si Dieu existait. Je ne crois plus en Dieu à cause de la façon dont mes enfants et ma famille m’ont traitée». L’ascenseur émotionnel fonctionne à pleins tubes. On peut en déduire que la popstar est décidément hors de contrôle. Mais n’était-ce pas précisément ce à quoi elle aspire depuis 2007, et ce que le monde entier lui a souhaité, à mesure que s’accumulaient les années passées sous tutelle ? Partant, libre à elle de se surexposer comme bon lui semble, jusqu’au vertige. Dans le même temps, libre à ses fils de se tenir à l’écart de ce vertige.