Andreï Gratchev, LA CHUTE DU KREMLIN, L'EMPIRE DU NON-SENS, traduit
du russe par Galina Ackerman et Pierre Lorrain. Hachette, «Vie quotidienne», 287 pp.,95 F.
Il est si rare aujourd'hui d'entendre une voix chargée d'émotion parler de la conduite d'un pays, de la gestion d'un Etat, bref, de politique, que le nouveau témoignage d'Andreï Gratchev sur les derniers mois de l'ex-URSS a quelque chose de rafraichissant. L'univers qu'il évoque d'une plume souvent heureuse semble pourtant n'évoquer en rien ce sentiment: c'est celui des fonctionnaires gris d'un Parti plus que grisonnant qui, dans le ballet de leurs limousines noires entre les différents centres du pouvoir dans le Moscou de la fin d'un mythe, tenteront d'oublier jusqu'au bout que l'histoire les a laissés en chemin.
Mais Andreï Gratchev, qui fut membre de la commission internationale du Comité central de feu le PCUS avant de devenir, après le pustch raté d'août 1991, le porte-parole de Mikhaïl Gorbatchev pour quelques semaines, sait faire revivre ce mélange de routine bureaucratique et de drames soudains en le replaçant dans l'histoire d'une Russie aussi baroque que les façades du vieux Moscou.
«A chaud», peu de temps après que Boris Eltsine avait délogé le Président soviétique de son bureau du Kremlin avec une indélicatesse qu'il ne lui a jamais pardonnée, Andreï Gratchev avait écrit une Histoire vraie de la fin de l'URSS où il révélait, grâce au poste d'observateur privilégié que lui avait donné sa charge, maints secrets d