Aujourd'hui rééditées, les poésies complètes de Louis Brauquier,
mort à 76 ans en 1976, ressuscitent un poète oublié, malheureusement «plus connu du registre des Affaires maritimes que des manuels littéraires», selon le mot du préfacier Olivier Frébourg. Dommage, car il y a chez cet errant moins d'affectation que chez beaucoup d'autres bourlingueurs, plus d'authenticité et d'émotion aussi: c'est une oeuvre libre, brute, pas roublarde, qui peut se lire en continu, et qui réveille chez son lecteur la nostalgie d'un monde pas encore rétréci, celui des voyages au long cours, des paquebots et des liners, des compagnies maritimes et des comptoirs d'outre-mer. L'oeuvre d'un fils de Rimbaud et Conrad, d'un petit frère de Cendrars et Saint-John Perse.
D'où viennent les vocations? Celle de Louis Brauquier, né avec le siècle à Marseille à deux pas du Vieux-Port, semble limpide: «Dès que j'ai su marcher, on m'emmenait, à chaque arrivée et à chaque départ de mon oncle, à la Joliette. Les navires étaient des paquebots d'un assez faible tonnage, construits pour la course, ils transportaient le courrier, ils étaient amarrés perpendiculairement au quai, le long des mahonnes qui oscillaient lourdement sous les pas. (...) Jamais je n'ai oublié l'odeur des coursives où se mélangeaient celle de la peinture fraîche, celle, poivrée, qui venait des cales, et celle, opaque, de l'opium que fumaient dans leur poste, au-dessous de la ligne de flottaison, les boys chinois.»
A 18 ans, Louis Brauquier se fai