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Libération
Critique

Le voilà, Péret

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Jamais il ne changea de ligne : surréaliste de la première heure, il se montra d'une constante intransigeance, même à l'égard de ses proches, ce qui lui vaut d'être toujours au purgatoire. Publication, avec en tête «le Déshonneur des poètes», du dernier tome des Œuvres complètes de Benjamin Péret.
publié le 12 janvier 1995 à 23h47

Dans la deuxième édition de l'Anthologie de l'humour noir (1950) où fait son entrée Benjamin Péret, André Breton écrit: «Il fallait ­– on va voir pourquoi je pèse mes mots –­ il fallait un détachement à toute épreuve, dont je ne connais bien sûr pas d'autre exemple, pour émanciper le langage au point où d'emblée Benjamin Péret a su le faire. Lui seul a pleinement réalisé sur le verbe l'opération correspondant à la sublimation alchimique qui consiste à provoquer l'ascension du subtil par sa séparation d'avec l'épais». André Breton voit en Péret un «libérateur»: avec lui, «la censure ne joue plus, on excipe du tout est permis. Jamais les mots et ce qu'ils désignent, échappés une fois pour toutes à la domestication, n'avaient manifesté une telle liesse. (...) J'en parle de trop près comme d'une lumière qui, jour après jour, trente ans durant, m'a embelli la vie. L'humour jaillit ici comme de source.»

Malgré la force de l'hommage, il aura fallu trente ans pour que soit terminé le travail entrepris par l'éditeur Eric Losfeld: publier les oeuvres complètes de son ami Benjamin Péret, surréaliste parmi les surréalistes, mort à 60 ans en 1959 d'une thrombose de l'aorte. C'est qu'on connaît mal Benjamin Péret, il est comme au purgatoire, sans qu'on sache trop bien pourquoi. Dans une brève et bien agressive introduction au septième et dernier tome, Jean Schuster l'appelle «B. le banni» ou encore le «mouton noir» du surréalisme et s'e