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Critique

Hommages rapés : ""R.I.P.N.Y.C. bombages in memoriam à New York city""

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publié le 26 janvier 1995 à 0h42

C'est en 1988 qu'explosèrent sur les murs de New York, ville où la

mort violente court comme une épidémie irrépressible (2 000 assassinats au bas mot chaque année, une personne abattue toutes les 88 minutes), les bombages in memoriam, simples épitaphes ou larges fresques commémoratives érigés en souvenir des disparus. Depuis, de Lower East Side à Brooklyn et au Bronx, des dizaines de murs et de façades d'immeubles se sont recouverts de peintures multicolores, monuments sauvages rappelant que malgré la violence et la décomposition du tissu social qu'elle entraîne, des familles ou des communautés pouvaient encore trouver la forme et la force d'une réponse collective.

L'album R.I.P.N.Y.C. (Requiescat in Pace à New York City) recense les plus belles pièces de cet art mural brut, spectaculaire successeur des taggers métropolitains des années 80. A l'automne 1993, les deux auteurs ont suivi dans les dédales de la ville Francisco «Pops» Rivera, expert et historien du mouvement. Ils ont appris que ces fresques n'évoquent pas seulement les victimes de la drogue ni celles du banditisme et de la guerre des gangs, mais qu'elles peuvent surgir en mémoire d'un accidenté de la route ou d'un malade du sida. Plus sinistre encore, nombreux sont les jeunes Blacks ou Latinos qui, craignant de mourir jeunes, commandent par anticipation à des artistes leur propre mémorial.

Le phénomène a en effet engendré tout une génération d'artistes, amateurs ou véritables professionnels, anonymes ou célèbres, q