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Critique

""Journal"" et ""Mémoires"" de Edith Thomas. Une femme plus résistante

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Historienne, journaliste, romancière, Edith Thomas (1909-1970) est une figure méconnue de la Résistance. Publication de ses Mémoires et de son Journal de guerre, où elle fait le récit de l'Occupation, de ses relations orageuses avec Aragon et les communistes.
publié le 23 février 1995 à 0h53

Qui connaît aujourd'hui Edith Thomas, qui se souvient seulement de cette intellectuelle engagée, dont le général de Gaulle citait les poèmes en 1943 et dont Jean Guéhenno disait qu'elle était de celles qui incarnaient «la Résistance courageuse»? Historienne, journaliste, romancière, Edith Thomas est sans doute morte trop tôt, en 1970, à l'âge de 61 ans, à une époque où le mythe d'une France globalement résistante avait encore la peau dure. Peut-être la publication de deux inédits, son Journal de guerre (1939-1944) et ses Mémoires, écrites au début des années 50 et conservées par son amie Dominique Aury, va-t-elle sortir de l'oubli cette combattante de l'ombre.

Ce ne serait que justice, tant le destin d'Edith Thomas sort du commun. Elle naît en 1909 d'un père ingénieur et d'une mère institutrice, tous deux catholiques agnostiques. A 16 ans, elle se convertit au protestantisme, «sans crise mystique ni passion», mais déjà par «goût de la minorité et de la dissidence». En 1931, elle sort de l'école des Chartes avec un diplôme d'archiviste. C'est à ce moment qu'elle est atteinte d'une tuberculose osseuse qui la laissera boiteuse. Pour dépasser sa souffrance, elle fait «appel à cet orgueil qui consiste à regarder froidement les choses en face. Je surmonterai tout, même de vivre infirme, par la lucidité.» Elle tiendra parole, jusqu'à sa mort.

Les dévôts d'Aragon

Dans le même temps, elle se met à écrire: «Je ne savais si ce que j'écrivais serait jamais publié. Mais j'avais besoin d'écrire comme on a beso