Menu
Libération
Critique

La peinture par le bout du nez : ""De la peinture italienne""

Article réservé aux abonnés
publié le 2 mars 1995 à 2h31

Heinrich Wölfflin, dont les Principes fondamentaux d'histoire de

l'art paraissent en 1915, est sans doute la cause de l'éclipse de Giovanni Morelli (1816-1891), alias Ivan Lermolieff, de son vrai nom Morell, né à Vérone d'une famille protestante française, émigrée en Italie via la Suisse. Et c'est à un contresens commis par Freud dans le Moïse de Michel-Ange (1914) que nous devons sa redécouverte depuis une trentaine d'années. Selon Freud, Morelli aurait «opéré une révolution dans les musées d'Europe» en «révisant l'attribution de beaucoup de tableaux» grâce à une méthode qui fait «abstraction de l'effet d'ensemble» et relève «la signification caractéristique de détails secondaires» et involontaires. Et Freud de conclure: «Je crois sa méthode apparentée de très près à la technique médicale de la psychanalyse.» Or, il réduit ainsi la méthode de Morelli à la seule troisième classe de caractères ­ les habitudes qui échappent au peintre ­ que Morelli considérait comme une sorte de piste annexe. Morelli a d'ailleurs élaboré sa méthode en ayant conscience des limites de son champ d'application: historiquement «jusqu'à la mort de Raphaël» car, après lui, les peintres multiplient «ces maniérismes qui sont comme les fioritures de la calligraphie (et) sont des indices très peu fiables et de faible valeur pour identifier les tableaux». D'ailleurs le mot «style» n'apparaît pour ainsi dire jamais chez Morelli.

La forme du visage, le coloris, le drapé Ce qui l'intéresse, c'est l'établissem