Elie Wiesel, 65 ans, prix Nobel de la paix en 1986, est, depuis quinze ans, l'ami du Président. Et, d'une certaine manière, sa «conscience». Elevé dans une petite communauté juive de Transylvanie déportée par les Allemands, survivant d'Auschwitz et de Buchenwald où toute sa famille a été tuée, Elie Wiesel a mené un combat pour la mémoire à travers ses écrits et ses actions en faveur de causes multiples des juifs soviétiques jusqu'à Sarajevo. Il partage son temps entre New York (il est citoyen américain), Paris (où il a été accueilli après la guerre) et Jérusalem. Après le premier tome de ses Mémoires Tous les fleuves vont à la mer (Seuil), le deuxième tome devrait aborder les trente dernières années et traiter de ses rapports particuliers avec François Mitterrand.
Il s'agit donc dans ce livre, de parler de l'enfance. Or on ne peut imaginer deux enfances plus différentes et le télescopage est parfois hallucinant. Ainsi quand vous évoquez la douleur de votre retour dans votre ville natale de Sighet, où la communauté juive a été massacrée, François Mitterrand dit qu'il «éprouve, en plus atténuée, la même impression»... quand il retourne à Touvent.
L'idée est venue de Jack Lang, il y a très longtemps, de faire un livre d'entretiens, justement parce que nous sommes des hommes si différents. J'étais proche du Président et je l'avais conçu comme une sorte de conversations entre deux amis. Au départ cela devait être un livre intemporel, sur des questions non politiques, l'amour, la