L'Italien Antonio Tabucchi s'est défait de Fernando Pessoa pour se
choisir un héros, toujours portugais mais bien plus résistant au fascisme: «Pereira prétend».
Antonio Tabucchi,PEREIRA PRÉTEND.
Traduit de l'italien par Bernard Comment. Christian Bourgois, 220 pp., 100 F.
Lisbonne, fin juillet 1938. Dans la ville enveloppée d'un «suaire de chaleur», un vieux journaliste, le doutor Pereira, veuf, cardiaque, tourmenté, d'origine juive mais catholique, obsédé par la mort mais ne croyant pas à la résurrection de la chair. Après trente ans de faits divers, il est désormais en charge de la page culturelle hebdomadaire du quotidien Lisboa. Il engage un jeune pigiste à qui il confie la rédaction des nécrologies. Ce dernier ne lui rend que des éloges impubliables, de Lorca, de Marinetti ou de Maïakovski. C'est que le Portugal est en pleine dictature salazariste, qu'en Espagne voisine les troupes nationalistes de Franco sont en train de gagner la guerre civile aux cris de «Viva la muerte!». Pourtant, au lieu de congédier ce collaborateur inadapté, le doutor Pereira se prend au contraire d'amitié pour lui et pour sa compagne, une belle et mystérieuse jeune femme qui se révèle une combattante de l'ombre au service des républicains espagnols.
Jusque-là, le vieux journaliste ne s'est pas mêlé de politique: il n'a jamais bronché et s'est toujours soumis au pouvoir et à l'ordre. Seule une admiration pour la littérature française, et notamment pour les catholiques frondeurs comme Bernanos, Marit