Rodrigue, as-tu du foie de tortue?
Débarqués sur l'île Rodrigue, dans l'archipel des Mascareignes, une poignée de robinsons parpaillots fait bombance. Depuis le XVIIe siècle, le récit d'aventures gastronomiques du sieur Leguat a gardé toute sa saveur.
François Leguat, les Naufragés de Dieu. Phébus, 203 pp., 119 F.
Parmi tous les ouvrages du même type, c'est une bien singulière aventure que nous narre le sieur Leguat dans sa «relation» parue à la toute fin du XVIIe siècle à Amsterdam: une histoire d'île déserte sans naufrage (malgré le titre), sans bon sauvage ni sauvetage providentiel. C'est dire qu'il s'agit d'une «robinsonnade» d'un tout autre type, malgré les rapprochements culottés tentés par l'éditeur en quatrième de couverture.
Notable bourguignon dépossédé de son bien par la révocation de l'édit de Nantes en 1685, Leguat était un parpaillot déjà plus très jeune lorsqu'il s'embarqua sur l'Hirondelle, frêle esquif armé par le marquis du Quesnes en vue d'explorer les possibilités d'implantation dans l'archipel des Mascareignes. Les Hollandais étaient vaguement présents dans l'île Maurice, les Français peut-être en l'île d'Eden (La Réunion), mais il restait encore, un peu plus à l'Est, un îlot repéré jadis par les Portugais qui répondait au nom de Diego-Ruiz, ou Rodrigue. Les instructions de du Quesnes étaient précises, mais c'était compter sans le capitaine de l'Hirondelle, un Breton sans scrupules nommé de façon prémonitoire Antoine Valleau, qui débarqua sommairement Legua