Le contrôle des naissances est, en France, une très ancienne réalité, attestée dès les XVIIe-XVIIIe siècles. Les Français avaient dès lors commencé à espacer leurs naissances, non seulement par l’abstinence, mais par le recours au coït interrompu et au «péché d’Onan» pourtant vigoureusement condamné par l’Eglise. Cette sécularisation des conduites sexuelles correspondait à une forte culture familiale et à une autonomie croissante de la sphère privée. De plus en plus, le lit conjugal échappait à l’Eglise et, au XIXe siècle, les clercs n’osaient plus trop le sonder; ils préféraient se concentrer sur le sexe des collégiens, toujours suspectés de se masturber. Aussi manifestèrent-ils une surprise gênée lorsque, au début du XXe siècle, la hiérarchie leur demanda de rappeler les époux chrétiens à leurs devoirs.
Plusieurs séries de facteurs avaient poussé l'Eglise à sortir de sa réserve. D'une part, le développement de cette scientia sexualis, qui de Havelock Ellis à Freud était en voie de constituer la sexualité en problème majeur de la modernité, avait réveillé sa vieille angoisse charnelle. D'autre part, l'Eglise se sentait concernée par l'anxiété démographique de l'Etat, exprimée dès 1900 et évidemment accentuée par l'hécatombe de la guerre. L'Eglise ne pouvait rester indifférente à cette mobilisation nataliste. Elle la cautionna de tout son poids, célébra la famille, exalta la maternité comme seul destin de la femme et pourfendit l'avortement et la propagande contraceptive, l'u