Un homme à abattre
Antifasciste de la première heure persécuté pour ses convictions, Emilio Lussu (1890-1975) fut aussi l'auteur d'un des plus beaux récits italiens sur la Grande Guerre, «les Hommes contre».
Emilio Lussu, LES HOMMES CONTRE. Traduit de l'italien par Emmanuelle Genevois et Josette Monfort. Austral, 264 pp., 130 F.
Qui a assisté aux événements de ces jours-là, les reverra, je le crois, à l'heure de sa mort», écrit Emilio Lussu dans les Hommes contre, l'un des deux plus beaux récits italiens sur la Première Guerre mondiale, l'autre étant Journal de guerre et de captivité de Carlo Emilio Gadda. A dire vrai, le titre authentique des Hommes contre est Un anno sull'Altopiano (Un an sur le haut-plateau), mais l'éditeur a préféré utiliser, pour cette première traduction française, le titre du film que Francesco Rosi a tiré de ce texte en 1970. La première édition italienne était parue à Paris en 1938, ainsi que d'autres livres de Lussu comme Marche sur Rome et les environs (1933) ou Théorie de l'insurrection (1936). C'est en Suisse, dans un sanatorium de Davos où il se remettait d'une très méchante opération aux poumons, qu'Emilio Lussu avait écrit en quelques mois les Hommes contre, comme si la perspective de mourir avait fait resurgir dans sa mémoire des événements qui s'étaient déroulés vingt ans auparavant.
La route qui mène Emilio Lussu (1890-1975) de sa Sardaigne natale à Paris n'est pas banale. Engagé volontaire, dès l'entrée de l'Italie dans le conflit en 1915, d