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Libération
Critique

Camus, une vraie peste. Au risque de mettre son lecteur dans une position inconfortable, Renaud Camus use et abuse de l'immunité quasi parlementaire du roman en se gaussant, dans «l'Épuisant désir de ses choses», des vertus ridicules de la pensée conforme. Renaud Camus, L'EPUISANT DESIR DE CES CHOSES. P.O.L., 318 pp., 120 F.

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publié le 8 juin 1995 à 5h35

Le titre est une formule magique proustienne. A la comtesse de

Noailles qui se rend à Florence, Marcel indique que, s'il devait l'accompagner, il ne sortirait pas, mais qu'il la rejoindrait parfois très tard le soir pour qu'elle lui raconte «comment c'est». Et de compléter sa pensée: «Cela me rendrait très malade mais j'ai besoin de ces châtiments pour interrompre un peu l'épuisant désir de ces choses.» Or, contrairement à son épouse Anne, Jean Deladevèze ne s'arrange vraiment pas de «l'épuisant désir de ces choses»: expression à laquelle l'attelage d'un démonstratif pluriel avec le mot ­ d'un si précieux vague ­ de «choses», donne évidemment toute sa beauté.

Une tentative d'inventaire du monde Jean Deladevèze est éditeur à Paris et, par un très maigre hasard, le principal personnage du nouveau roman de Renaud Camus. Quand on apprend que son chat s'appelle Balladur (et que celui-ci «ronronne de satisfaction pansue»!); qu'il possède un appartement rue de Grenelle et deux châteaux de famille; et qu'il ne supporte pas ­ comme il l'entend faire à la télévision ­ qu'on dise d'un Noir qu'il est écossais, on songe, nous, en bons lecteurs de Libé, que ce Jean Deladevèze est peut-être, allez donc savoir avec ces héros de romans modernes, un vieux con de droite. C'est du reste l'avis de sa fille Claire qui trouve son père «hyper-facho et tout, quand il s'y met». Ainsi le roman de Renaud Camus avance-t-il en canard. Un coup sur deux, un chapitre sur «L'épuisant désir de ces choses»: th