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Critique

Les vérités de la palette. Esthétique. Les rapports entre la vie politique, la société et la peinture du XIXe siècle sont restitués par la lecture féministe de l'Américaine Linda Nochlin dans «les Politiques de la vision». Linda Nochlin, LES POLITIQUES DE LA VISION. Jacqueline Chambon, 288 pp., 148 F.

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publié le 8 juin 1995 à 5h35

Professeur d'histoire de l'art à New York, où elle est née et a fait

ses études, Linda Nochlin est spécialiste de la peinture et de la sculpture du XIXe siècle. Les Politiques de la vision, recueil d'articles et de conférences écrits sur un intervalle de plus de vingt ans (de 1965 à 87), propose des analyses du contenu de tableaux comme l'Atelier du peintre de Gustave Courbet, le Dimanche d'été à la Grande Jatte de Seurat, des oeuvres moins célèbres de Francisco Oller et Léon Frédéric, révèle l'affinité méconnue qui lia Paul Renouard à Van Gogh, revient sur le Bal à l'opéra de Manet, plonge dans «le scepticisme de Pissaro», et met en évidence les positions anti-dreyfusardes de Degas. L'une des constantes de ces études est la mise en lumière de l'intrication de l'oeuvre d'art et de la pensée politique du peintre. Linda Nochlin montre que le XIXe siècle a été traversé par des courants idéologiques, au premier rang desquels le socialisme et le fouriérisme, mais aussi le colonialisme et l'antisémitisme, qui apparaissent de manière littéralement palpable sur les oeuvres réalistes de l'époque.

«Un paysage de suicide»

Le XIXe siècle a été considéré par les historiens d'art comme une période assez proche pour répondre aux mêmes méthodes d'analyse que celles qui semblent convenir au XXe: en particulier le «formalisme», qui néglige par principe «l'analyse approfondie du contenu des oeuvres peintes et sculptées» ­ «l'art moderne, par définition eût-on dit, échappait à l'iconographie», c'e