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Libération

Comment faire savoir à ceux qui ne savaient pas? Une synthèse en photos et en témoignages sur les réactions immédiates et la stratégie des Alliés à «la Libération des camps». Marie-Anne Matard-Bonucci et Edouard Lynch (sous la direction de), LA LIBÉRATION DES CAMPS ET LE RETOUR DES DÉPORTÉS. Complexe, 287 pp., 120 F.

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publié le 22 juin 1995 à 6h02

Un jour d'avril 1945, George Rodger, un photographe américain

travaillant pour Life et suivant l'avance alliée en Allemagne, pénètre dans le camp de concentration de Bergen-Belsen. Il n'a aucune idée de l'enfer qu'il va découvrir: «J'ai vu un tas de gens couchés sous les arbres, sous les pins», racontera-t-il cinquante ans plus tard, «je croyais qu'ils dormaient, roulés dans des couvertures. J'ai eu l'impression d'une jolie scène, paisible. J'ai pris des photos, j'ai une photo de ça. C'est la première que j'ai prise là-bas, c'est ma première vue de l'intérieur du camp, ma première impression. Mais, après, tout de suite, quand je me suis avancé parmi eux, je me suis rendu compte qu'ils ne dormaient pas du tout, ils étaient morts. Je me suis trouvé confronté brusquement à, je ne sais pas combien exactement, 3 000, 4 000 morts, alignés sous les arbres. C'était terrifiant. Comment absorber ça, c'était tout simplement impossible, trop affreux.» Ce vieux routier des champs de bataille sera si choqué ­ «Bergen" c'est quelque chose qui vous pénètre jusque dans le sang, dans le nez, on sent l'odeur de la mort» ­ qu'il fera après guerre «le voeu de ne plus jamais photographier la guerre» et partira en Afrique à la recherche d'«un endroit absolument intact et primitif».

Visites forcées Ce témoignage impressionnant illustre le choc qui frappe de plein fouet les soldats et les populations à la fin de la guerre, dès la révélation de l'univers concentrationnaire nazi. Il figure, parmi d'autr