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Libération
Critique

Champion d'immonde. Pour avoir su, avec un humour féroce, pointer la médiocrité et la bassesse de ses compatriotes, Ring Lardner est passé à la trappe de la littérature américaine. Réédition de «Champion». Ring Lardner, CHAMPION, traduit de l'américain par Jacques Guicharnaud. 10 /18, 256 pp. 44 F.

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publié le 21 septembre 1995 à 7h50

Ring Lardner mourut en 1933 à l'âge de 48 ans, terrassé par une

tuberculose soignée à coups de bourbon. Scott Fitzgerald, déjà hanté par le spectacle de sa propre déchéance, publia dans le New Republic un hommage des plus émouvants à son vieil acolyte alcoolique: «Jamais je n'ai senti que je l'avais assez connu, ou que quiconque le connaissait ­ ce n'était pas le sentiment qu'il y avait plus de choses en lui et qui devraient sortir, c'était plutôt une différence qualitative, c'était plutôt comme si, à cause de quelque impossibilité à s'identifier à soi-même, quelqu'un avait pénétré dans quelque chose absconse, nouvelle, et non dite. C'est pourquoi on souhaiterait que Ring ait écrit longuement sur ce qu'était son esprit, son coeur. Ceci l'aurait pour nous sauvé depuis longtemps, et, en soi, ç'aurait été quelque chose d'important. J'aimerais savoir ce qu'il était, et maintenant j'en suis réduit aux hypothèses, qu'est-ce que Ring voulait, comment voulait-il que les choses aillent, comment pensait-il que les choses allaient?»

Les deux compères avaient fait connaissance au début des années 20. Tous deux originaires de l'Ouest, Fitzgerald du Minnesota, Lardner du Michigan, ils étaient venus s'échouer du côté de Long Island afin d'essayer de gagner les faveurs de la critique new-yorkaise. A l'époque de leur rencontre, Lardner n'était encore qu'un simple journaliste sportif qui, de temps à autre, publiait quelques nouvelles et autres poèmes satiriques dans le Saturday Evening Post. S