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Libération
Critique

Corps à corps. Pas plus que de faire quelque chose de sa vie, il n'avait envie d'épouser la fille du croque-mort: un adolescent des années 50 dans une Amérique morte à son rêve de bonheur, par Rick DeMarinis. Rick DeMarinis, L'APPRENTI CROQUE-MORT, traduit de l'américain par Martine Leroy-Battistelli. Denoël, 320 pp., 140 F.

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publié le 28 septembre 1995 à 7h54

A force de lire ses romans peuplés de jeunes hommes à la dérive et

d'adultes irresponsables, on va finir par penser que la jeunesse de Rick DeMarinis fut un cauchemar rempli de jeunes filles idiotes, d'adolescents attardés, noyés dans un océan d'alcool. Le tout sous le regard ahuri d'adultes désabusés, égarés dans un monde qu'ils n'ont pas voulu et dont ils n'attendent plus grand-chose, si ce n'est de s'offrir une bonne cuite, de sentir une fois par semaine leur virilité gâtée par leurs tendres épouses et de s'offrir tous les cinq ans le nouveau modèle de chez Ford.

Situé dans les années 50, au coeur d'une Amérique bien décidée à empêcher la racaille rouge de pervertir sa jeunesse, l'Apprenti croque-mort décline le destin funèbre d'Ozzie, un adolescent qui, au sortir de ses années de lycée, va vite se rendre compte que ses plus belles années sont derrière lui. D'autant plus que les perspectives dessinées par son beau-père n'ont rien d'excitant: «Tu es censé faire quelque chose de ta vie. Pas forcément de grandes choses, mais quelque chose. Je suis dessinateur industriel. Un bon dessinateur industriel. Et ça suffit. C'est comme ça qu'on s'en tire dans la vie. On trouve quelque chose à faire, et on le fait aussi bien que possible.» Animé d'aucune passion particulière si ce n'est celle de s'enivrer de la musique de Charlie Ventura, Ozzie se contente de traîner son ennui à l'ombre de bordels à deux dollars et de s'offrir quelques virées au Mexique, avec comme ticket retour une gu