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Critique

Péroraison pour la Raison . Malgré les errements de la raison dans l'histoire du XXe siècle, il est possible, selon Christian Delacampagne, de redonner à la philosophie les idéaux du siècle des Lumières. Christian Delacampagne, HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE AU XXe SIECLE. Seuil, 386 pp., 140 F.

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publié le 5 octobre 1995 à 9h35

Les philosophes peuvent-ils encore se fier à la raison, après les

tours qu'elle leur a joués tout au long de ces cent dernières années? En renfermant son Histoire de la philosophie au XXe siècle, Christian Delacampagne n'en est pas sûr mais, raisonnablement, il le souhaite avec force. Autant dire que cette histoire se présente, comme toute véritable entreprise philosophique, moins comme une réponse que comme le renouvellement d'une interrogation qui, à la fin du siècle dernier, a occupé les tenants et les adversaires du rationalisme. Une histoire des idées, donc, mais des hommes aussi, qui fait une place conséquente à des notions comme école, mouvement, influence, filiation, car les débats philosophiques «ne peuvent pas être abstraits du contexte historique». Chistian Delacampagne lui-même n'est pas un penseur enfermé dans une tour d'ivoire: actuellement attaché culturel et scientifique à l'ambassade de France à Boston, il collabore de longue date au supplément littéraire du Monde.

«Fonctionnaire de l'humanité»

A l'origine des grands bouleversements d'où sortira une bonne partie de la philosophie du XXe siècle, on trouve l'oeuvre d'un mathématicien isolé, Gottlob Frege (1848-1925). Pour lui, et à l'envers de Kant, les propositions arithmétiques ne relèvent pas de l'intuition, mais sont à considérer comme des concepts analytiques. Dans son sillage, Edmund Husserl (1859-1938) s'attache à «préserver la nature objective des concepts logiques, seule garantie de validité universelle