Cléomène, roi de Sparte, s'est-il suicidé ou a-t-il été assassiné?
Et encore: était-il fou à lier ou sain d'esprit? Dans l'une et l'autre alternative, les Anciens, à commencer par Hérodote, penchaient pour le premier terme. Les historiens modernes ont fait leur le second: la mort atroce de Cléomène ne serait qu'un assassinat politique maquillé en suicide. Dans Cléomène le roi fou, Georges Devereux non seulement partage le point de vue des Anciens, mais il en apporte les preuves en dressant le dossier clinique d'un malade d'il y a deux mille cinquante ans, «atteint depuis sa jeunesse d'une schizophrénie paranoïde à caractère évolutif». Georges Devereux (1908-1985) fut l'un des fondateurs de l'ethnopsychiatrie et l'un des premiers à appliquer la psychanalyse et la psychiatrie à l'histoire et aux sociétés éloignées dans le temps. Hongrois, probablement converti au christianisme, cachant opiniâtrement ses origines juives, émigré en France puis aux Etats-Unis, revenu dans l'Hexagone pour enseigner à l'Ecole des hautes études et y mourir, et finalement être enseveli dans le cimetière des Indiens Moahve de Parker, Georges Devereux n'a pas eu un parcours ordinaire. Chercheur fondamentalement solitaire, il a été tour à tour élève de Marie Curie pour la physique, de Marcel Mauss et Lucien Lévy-Bruhl pour l'anthropologie et de Geza Roheim pour la psychanalyse. Ce n'est qu'à 51 ans que Devereux se consacre à l'étude du grec, au moment où, comme l'écrit Jacquy Chemouni dans la préface à