Le corps de M. Descartes était d'une taille un peu au-dessus de la
médiocre, mais assez fine et bien proportionnée dans la justesse de toutes ses parties. Il paraissait néanmoins avoir la tête un peu grosse par rapport au tronc. Il avait le front large, et un peu avancé; le teint assez pâle depuis sa naissance jusqu'au sortir du collège, puis mêlé d'un vermillon éteint jusqu'à sa retraite en Hollande, et depuis un peu olivâtre jusqu'à sa mort"» Grosse tête, petit corps, teint mi-cadavérique mi-terreux, une santé chancelante: ce portrait de René Descartes est aussi célèbre que la biographie où on peut le lire est incontournable. Publiée par le père Adrien Baillet en 1692 un demi-siècle après la mort du philosophe, et au moment où tout honnête homme ne pouvait que se dire cartésien et chérir désormais les idées claires et distinctes , la Vie de Monsieur Descartes (1), a en effet gardé l'éclat d'il y a trois siècles, alors que la philosophie de son héros était tour à tour exaltée ou rabaissée, bref, subissait l'épreuve du temps. A l'occasion du quatrième centenaire de la naissance du philosophe, Geneviève Rodis-Lewis a osé se mesurer au monument de Baillet, moins d'ailleurs pour le défaire que pour le refaire. Ce professeur honoraire à la Sorbonne, qui a publié son premier (d'une longue série) livre sur Descartes en 1950, l'Inconscient et le cartésianisme, a une connaissance intime de l'oeuvre cartésienne ce qui lui permet de jongler brillamment avec les paradoxes que renc