D'abord, le Tombeau du dieu artisan est un livre de Serge Margel. Le livre qu'un philosophe, après beaucoup d'autres, consacre au Timée, cet ouvrage de Platon qui recèle une très ancienne sagesse sur l'origine du monde à coup sûr, le texte le plus commenté de la philosophie occidentale. En même temps, le Tombeau du dieu artisan propose Avances de Jacques Derrida, le don d'une générosité sans égale qu'un philosophe établi, et célèbre, fait à un jeune confrère débutant pour en saluer le travail et lui promettre un destin hors du commun. Dans le Timée, on le sait, il est question d'un démiurge divin qui, après avoir façonné le monde à l'image des Idées éternelles, s'en retire, en ayant auparavant promis qu'il ne ferait jamais rien pour annihiler ce qu'il vient de fabriquer. Et c'est là tout le paradoxe de la position du démiurge. Qui peut finalement garantir que soit tenue la promesse d'un dieu absent? Qui, sinon les héritiers que nous sommes de ce monde qui nous est échu en vertu de la dite promesse? De la même manière, qui peut garantir que se réalise «l'immense promesse» faite par Jacques Derrida à Serge Margel et à son Tombeau du dieu artisan, sinon le lecteur de ce livre généreux et difficile?
Mais venons-en au commencement, à l'impensable de ce moment hors du temps (mieux, à cette omnitemporalité où le présent, le passé et le futur sont indiscernables), à ce moment où le démiurge, en fabriquant la voûte céleste et le mouvement cyclique des astres, fait exister le temps l