Il y a vingt-cinq ans, Jean-Pierre Faye signait un essai intitulé
Langages totalitaires (Hermann, 1972). Le Langage meurtrier reprend la même méthode d'analyse du langage et s'appuie sur la même conviction selon laquelle «de simples mots, de saints mots même, peuvent engendrer le mal», mais pour s'en prendre à des effets plus radicaux qui auront, autant que le totalitarisme, marqué notre siècle: les effets de meurtre. Les mots ont pu être aussi dangereux qu'une arme de guerre. Ils ont dû être tissés en «trames» idéologiques pour «faire parler» comme dit opportunément un langage populaire de telles armes et tuer des êtres humains. Exploitant deux références historiques la montée du nazisme et celle du fascisme mussolinien , Jean-Pierre Faye montre également que, de nos jours, «la montée des trames de meurtre, on peut encore l'observer sous des formes différentes.» Elles ont un dénominateur commun. «Il s'agit toujours de détruire la parole de l'autre et d'en arracher l'inscription.»
«Ce sont les chaînes de l'énonciation, tissées dans le circuit général de l'idéologie, qui ont constitué le lieu où, d'avance, les actes de mort étaient possibles, justifiés, réalisés»: un principe de méthode qui inscrit le Langage meurtrier dans la lignée d'un autre ouvrage de Jean-Pierre Faye, l'essai fondateur intitulé la Raison narrative (Balland, 1990; voir Libé du 17 janvier 1991). La méthode est ici scrupuleusement appliquée à l'étude de la manière dont le parti nazi a pu «commencer, e