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Libération
Critique

Femmes, c'est fatal.

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L'anthropologue Françoise Héritier traque, depuis les sociétés primitives, les structures élémentaires de la féminité.
publié le 21 mars 1996 à 2h27

Lentement mais sûrement, la réflexion sur la différence des sexes s'impose dans le paysage intellectuel français, quelque peu à la traîne des Etats-Unis sur ce point. Il n'est pas surprenant que les femmes en soient les principales protagonistes. Ces «autres» de l'homme, si longtemps définies par rapport à lui, éprouvent la différence comme fondement de leur identité. Au sein d'une abondante production, trois livres prennent le problème de front. D'abord, Françoise Héritier. Professeur au Collège de France où elle a succédé à Claude Lévi-Strauss, elle reprend la question de la pensée symbolique où il l'avait laissée. Les articles réunis ici montrent la cohérence et la force d'une dé- marche qui s'appuie sur l'étude des sociétés africaines, terrain de l'auteur, et plus largement sur la littérature anthro- pologique. La pensée symbolique de la différence des sexes a «l'universelle simplicité» de dispositifs où s'emboîtent milieux biologique, naturel et social, que régit une même opposition binaire: le chaud et le froid, le sec et l'humide, s'opposent comme le masculin et le féminin, catégories cognitives de si longue durée qu'elles paraissent premières. Du moins les trouve-t-on partout et, de surcroît, pareillement hiérarchisées. La domination masculine est un fait d'observation générale. L'auteur le vérifie tant dans le fonctionnement des systèmes de parenté que dans la mécanique des humeurs, coeur du livre.

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