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Libération
Critique

Pour les «Belles Etrangères» consacrées au Canada,propos à chaud de deux auteurs venus du froid. Râles sur rails. Des nouvelles où une locomotive attise une mélancolie galopante. Portrait de Jack Hodgins, un faulknérien fils de bûcheron. JACK HODGINS. Séparation. Traduit de l'anglais par Anne-Marie Girard-Sauzeau. Editions Alfil. 100 pp, 60 F.

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publié le 2 mai 1996 à 6h09

Envoyé spécial.

Né en 1938 sur l'île de Vancouver, dans une petite bourgade perdue entre montagne et forêt, Jack Hodgins ne s'est aventuré loin de ses terres que pour quelques escapades mouvementées en Australie, ou encore pour se rendre en pèlerinage à Oxford, Mississippi, sur les traces de William Faulkner: «Cela a été l'un des grands moments de mon existence, confie-t-il, de se retrouver là devant sa maison, à lire ses livres sous un arbre...» Faulkner, l'écrivain qui vient le plus souvent à l'esprit lorsque l'on se plonge dans l'oeuvre de Jack Hodgins tant sa démarche s'apparente à celle de l'auteur de Tandis que j'agonise. Avec cette même volonté de décrire, livre après livre, la vie de toutes ces petites gens, fermiers, cheminots, paysans, venus au Canada au début du siècle, d'Irlande ou d'Ecosse, pour se construire une nouvelle vie, dans cette île de Vancouver, ce paradis terrestre situé à l'extrémité ouest du Canada, au bord du Pacifique, lieu mythique que chaque écrivain canadien rêve un jour d'approcher et où Malcolm Lowry, pourtant loin d'être un hédoniste convaincu, trouva, entre 1941 et 1945, la paix et la félicité: «Nous habitions toujours sur la terre, au même lieu, mais si quelqu'un nous avait affirmé que nous étions au ciel, que cette vie-ci était la vie future, nous n'aurions pas tardé à nous joindre à son avis», écrivait-il dans le Sentier de la source.»

C'est à Victoria, en face de Vancouver, que vit désormais Jack Hodgins, partageant son temps entre l'écri