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Critique

C'est du vol. On ne sait jamais ce qui peut arriver quand on prend de la hauteur: un roman en altitude, par Daniele Del Giudice. DANIELE DEL GIUDICE. Quand l'ombre se détache du sol. Traduit de l'italien par Jean-Paul Manganaro. Seuil, 156 pp., 89 F.

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publié le 23 mai 1996 à 5h16

L'avion avait quelque chose de balistique, tu pouvais aller

n'importe où mais le vol accomplissait de toute façon son destin, et ce destin était toujours de la terre à la terre, quelle que fût la forme corporelle dans laquelle tu y arriverais.» Dans Quand l'ombre se détache du sol, son dernier roman traduit où il n'est question que d'avions, de pilotes et de vol ­ son «unique passion» ­, Daniele Del Giudice se tutoie souvent, comme s'il parlait à un second pilote imaginaire. Voler, donc, c'est se laisser aspirer par le ciel, c'est aussi une métaphore de la conduite de l'âme, mais pour Daniele Del Giudice ­ et contrairement au mythe platonicien ­, ce qui est difficile, ce n'est pas de perdre son ombre, mais de la retrouver à chaque fois. Cependant, par-delà son air réfléchi de conte philosophique, le troisième livre traduit de l'auteur du Stade de Wimbledon est le roman d'un adulte qui redevient enfant en apprenant à piloter un avion, et une complainte des aviateurs disparus.

On décolle, on vole, on se pose à nouveau. Parfois, cet enchaînement immuable connaît des ratés: Quand l'ombre se détache du sol raconte tout cela depuis le commencement. («S'il existait dans la mémoire un compartiment pour les premières fois ­ penses-tu en contrôlant que tout est éteint­, tu placerais le premier décollage en solitaire dans la même zone que la première fois en amour, parce que c'est la même intensité; il est cependant étrange que la première et bouleversante compénétration avec une autre c