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Libération
Critique

Tsar ou star? Par une spécialiste de l'ex-URSS, une biographie un peu trop fascinée de Nicolas II, renversé par les bolcheviks. Helene Carrère d'Encausse. Nicolas II. La Transition interrompue. Fayard, 552 pp., 150 F.

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publié le 19 septembre 1996 à 10h49

Il y a presque trois livres en un dans le Nicolas II que vient de

publier Hélène Carrère d'Encausse. Le premier est, bien sûr, la biographie de celui qui fut l'ultime tsar de Russie et l'«une des figures les plus pathétiques de l'Histoire». Des années d'apprentissage d'un héritier peu doué pour la vie politique, à la «tragédie familiale» qui commence avec l'hémophilie du jeune tsarévitch et qui s'achève par le sordide massacre de tous les Romanov à Iekaterinbourg en juillet 1918, l'auteur tisse les fils d'un récit très classique, qui devrait satisfaire les amateurs du genre. Le second est une vaste fresque qui embrasse l'histoire de la Russie depuis les réformes d'Alexandre II en 1861 jusqu'à la prise du pouvoir par les bolcheviks à l'automne 1917. S'il est parfois un peu rapide et souffre de l'absence d'appareil critique, l'ensemble est bien conduit et restitue la complexité de la période: vigueur de la croissance industrielle, ébullition intellectuelle et politique, mais aussi inadaptation sociale, blocages institutionnels, messianisme sombre marqué par l'emprise des prophètes et des mages (Raspoutine!). Reste le dernier «livre», sorte d'essai sur la signification politique de ce règne interrompu, qui, lui, suscite plus d'interrogations. Pour l'auteur en effet, Nicolas II, porteur d'un «projet modernisateur» capable de réconcilier modernité et génie national, représentait «la tentative désespérée de conduire la Russie vers la modernité, d'assurer l'indispensable transition