Fidèles à leur réputation de savoir créer la surprise, les jurés de l'Académie Nobel ont attribué hier leur prix de littérature à la poétesse polonaise Wyslawa Szymborska, âgée de 73 ans, qu'ils ont qualifiée dans leurs attendus de «Mozart de la poésie». On ne peut pas dire en effet que cette lauréate, la neuvième femme à être distinguée par cette récompense depuis sa création en 1901, jouisse en France d'une grande notoriété (1): elle est pourtant très connue en Pologne, où elle est enseignée depuis vingt ans dans les lycées et incarne un genre poétique qui séduit les Polonais depuis plusieurs générations, à savoir un mélange dans un style très accessible de lyrisme et de réflexion morale et philosophique. L'Académie suédoise salue ainsi dans son oeuvre «la légèreté avec laquelle s'ordonnent les mots» et y décèle «quelque chose de la furia d'un Beethoven» qui ferait penser «à la fois aux Lumières et au baroque».
La surprise a été totale pour la lauréate, réputée dans son pays pour être extrêmement modeste et détester la publicité. «Je suis étourdie et un peu effrayée par ce qui m'attend. Depuis deux ans déjà, je suis citée parmi les candidats, mais ils étaient si nombreux qu'il ne fallait pas s'y attendre. Etre citée parmi ces candidats est déjà un honneur»: c'est à Zakopane, une station de sports d'hiver dans les Tatras, où elle séjourne actuellement dans une pension de l'Union des écrivains polonais, que Wyslawa Szymborska a appris hier qu'elle était le quatrième écrivain