Pourquoi la tragédie n'allait-elle d'ordinaire chercher ses sujets
que dans l'Antiquité grecque et romaine? Que trouvaient à admirer la Fronde des nobles dans l'Astrée et la génération de Madame de Sévigné dans les romans de Mademoiselle de Scudéry?» Telles sont les questions que pose l'Art de l'éloignement de Thomas Pavel. Ce professeur de littérature à Princeton avait déjà publié au Seuil, en 1988, Univers de la fiction, une théorie originale des mondes fictionnels, l'Art de l'éloignement en est l'application à la littérature du XVIIe siècle.
Thomas Pavel propose ici une archéologie des fictions du classicisme en les articulant à l'histoire des idées. Car notre point de vue est toujours limité par deux présupposés. Celui de cohérence qui dote les siècles passés d'une forte unité de leur réel et de leur imaginaire. Et celui d'enracinement qui «consiste à croire que les habitants des époques prémodernes étaient à beaucoup d'égards mieux installés dans leur demeure symbolique (...)avec un calme et une joie dont nous avons depuis perdu le secret». Les mondes fictionnels du classicisme s'offrent ici plus comme un archipel de mondes possibles qu'ils n'offrent une véritable unité avec le réel du Grand-Siècle.
Thomas Pavel rappelle que le XVIIe fut le siècle de saint Augustin et qu'il a poursuivi deux projets parallèles: la reconquête catholique de la France et la réforme du comportement humain. C'est dans ce double mouvement que les fictions du classicisme trouvent leur ancrage. D'a