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Libération
Critique

Vivre en cases

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Le jeu d’échecs comme métaphore de la vie et de la littérature, par Rezvani, peintre, compositeur, dramaturge et écrivain.
publié le 9 janvier 1997 à 16h18

Un grand hôtel international, à la veille d’un tournoi d’échecs. L’atmosphère est dramatique: le champion refuse de sortir de sa chambre pour affronter son adversaire. Il se dit même prêt à renoncer à la compétition. Quelque temps auparavant, le jeune prodige a été victime d’un détournement sur l’aéroport d’Ankara et il en est resté traumatisé: le preneur d’otages n’était autre que son initiateur au jeu, un pensionnaire de l’hôpital psychiatrique dont son père était le directeur. Depuis, son équipe redouble d’efforts: au premier chef, la Mère, mentor autoritariste du fils, mais aussi, l’Entraîneur, le Biochimiste, le Major et le Parapsychologue, tous affublés de patronymes slaves imprononçables, tous un peu fêlés mais tous des as de leur spécialité. L’un entraîne le champion, l’autre étudie ses réactions physiologiques, le troisième organise sa sécurité, le dernier lit dans ses pensées et dans celles de ses adversaires. Dans l’hôtel, elle aussi cloîtrée dans sa chambre, se trouve Wanda, femme extravagante, aussi paresseuse qu’obèse, amante du jeune champion et son possible successeur, tant son redoutable génie au jeu menace non seulement le pouvoir tyrannique de la Mère mais tout l’univers échiquéen, jusque-là entièrement tenu par les hommes. Témoin de ces moments intenses, un écrivain, qui a entrepris d’écrire «autour» du monde des échecs et devient peu à peu le confident de tous les protagonistes mêlés au drame. Jusqu’à la fin de la partie. Dans Fous d’échecs, Rezvani ­