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Libération
Critique

Le FBI bibliophobe. De 1924 à 1972, la police fédérale a fiché une kyrielle d'écrivains, tous «dangers potentiels» pour les USA. Natalie Robins, Le FBI et les écrivains.Traduit de l'américain par Pierre Saint-Jean et Elizabeth Kern. Albin Michel, 540 pp.160 F.

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publié le 20 mars 1997 à 23h00

En enquêtant sur le FBI et les écrivains, Natalie Robins a fait un

travail d'archives qui n'aurait pas été possible sans la fin même des abus qu'elle relate et dénonce, utilisant une abondante et parfois terrassante documentation. De la Première Guerre mondiale jusqu'aux années 70 ­ au moins ­, le FBI (Federal Bureau of Investigation) ­ la police au service du gouvernement fédéral ­ espionna, ficha, traqua et persécuta parfois des dizaines d'intellectuels ou d'écrivains politiquement suspects à ses yeux. L'âge d'or de cette grande traque se situe entre 1924 et 1972 ­ dates qui encadrent le règne incroyablement long, à la tête de l'organisation, de J. Edgar Hoover, obsédé du complot communiste et de l'«extrémisme» noir, qui inventa pratiquement le système de l'indexation et du fichage-flicage. Natalie Robins, dans un récit rendu parfois monotone par l'accumulation factuelle et un plan rigidement chronologique, étudie les cas de 130 de ces écrivains. Autant dire qu'ils sont tous là, les «dangers potentiels» pour la sécurité du pays. Ernest Hemingway et Gertrude Stein, Dashiell Hammett et Lillian Hellman, Truman Capote et Richard Wright, Norman Mailer, Allen Ginsberg, James Baldwin et les autres.

C'est une loi très officielle, la loi sur la «liberté de l'information», qui a permis néanmoins à Natalie Robins de retrouver les fiches, commentaires, rapports consacrés aux activités de ces intellectuels. La règle est simple: les fiches concernant les écrivains morts sont tombées dans