En 1877, paraissait à Paris le premier tome de l'Iconographie
photographique de la Salpêtrière. La figure de proue de l'enseignement et de la recherche menés alors sur les hystériques et autres épileptiques rassemblés dans ces murs est Jean Martin Charcot: un homme dont la silhouette noire et le regard un peu exorbité apparaît maintes fois aux côtés des malades photographiés. Durant trente ans, de 1862 à 1893, il va occuper la chaire de Clinique des maladies du système nerveux et officier à la tête de la Salpêtrière avec une opiniâtreté sans faille. Au point de s'imposer comme un mythe vivant, dont les cours et les fameuses «présentations» des malades vont attirer les médecins anglais et allemands au nombre desquels compte évidemment Freud. Le vrai Charcot, de Marcel Gauchet et Gladys Swain, offre l'occasion de mieux connaître la nature exacte de ses travaux, dont la publication, d'ailleurs, n'est toujours pas achevée. Une entreprise bienvenue, quand on sait que le mythe, précisément, a produit l'effet pervers d'occulter ce qu'il convient d'appeler de fait le «vrai» Charcot - mythe conforté en particulier par le témoignage de Freud, qui lui attribue la paternité de notions telles que l'«élaboration psychique inconsciente», ou la «conscience officielle». On ajoute que Charcot aurait été «l'inventeur de l'hystérie mâle», mais là encore le propos appelle des rectifications: Charcot ne fut pas le seul ni le premier à contredire la thèse qui liait l'hystérie au sexe féminin.
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