De Paul Smaïl, on ne sait quasiment rien, sinon qu'il est
franco-marocain et qu'il vit à Casablanca. Dans une lettre adressée à son éditeur, et qui accompagne la sortie de son premier roman, il justifie ce choix de résidence par le fait qu'il ne veut devenir «ni le beur de service ni le porte-étendard d'aucune cause; je veux qu'on me juge uniquement sur ce que j'écris».Vivre me tue raconte la galère d'un beur qui a beau faire l'intégré, se faire prénommer par son père Paul au lieu de Mohammed, coller aux valeurs républicaines etc., aux yeux des autres, notamment des patrons qui l'auditionnent pour un job, il n'est qu'un «melon», un «raton», un «arbi», etc. Son faciès ne trompe personne. Sur le marché du travail, son DEA en littérature comparée ne vaut pas un clou; désespéré, il se rabat sur des boulots alimentaires et précaires: livreur de pizza, réceptionniste chez une bibliothécaire raciste, veilleur de nuit dans un hôtel mal famé, point de chute d'une faune nocturne un peu destroy. Ces boulots le renvoient sans cesse à sa condition de marginalisé, voire d'exclu.
Boulimique des livres Melville, Conrad, Stevenson et Genet comptent parmi ses auteurs favoris !, il tâte de l'écriture. Tous les soirs, pendant sa permanence à l'hôtel, il recompose son histoire, indissociable de celle de sa famille, l'exemple type d'une famille dévouée et déracinée, en mal de reconnaissance: le grand-père mort pour la France, l'oncle victime d'une ratonnade le 17 octobre 1961 à Paris. Le père emp