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Critique

Bourgeois de tous les pays. Pour Jean-Claude Milner, le «sursalaire» et le «surtemps» dont jouit la bourgeoisie sont garants de culture et de démocratie. Jean-Claude Milner, Le salaire de l'idéal. La théorie des classes et de la culture au XXe siècle Seuil, 128 pp., 89 F.

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publié le 16 octobre 1997 à 10h05

Le salaire de l'idéal propose une description critique de la forme

prise globalement par le capitalisme occidental au XXe siècle: un capitalisme qui se fonde sur la défense et la promotion du mode de vie «bourgeois». L'analyse reprend de Marx ses propres axiomes. Ainsi, «la bourgeoisie est le bras politique du capitalisme; le capitalisme est le bras économique de la bourgeoisie.» Cette bourgeoisie n'a cependant plus le même visage que son homonyme du siècle dernier: elle était propriétaire, elle est aujourd'hui rémunérée. La rémunération la plus classique, pour le prolétaire, est le salaire . Dans le cas du bourgeois il faudra parler de «sursalaire», c'est-à-dire d'une rémunération «en excès», évaluée indépendamment du prix de la force de travail effectivement fournie. En outre, cette rémunération peut prendre la forme d'un «surtemps»: le bourgeois ne bénéficie pas seulement du «repos» dont jouit le prolétaire (sommeil, alimentation destinés à la simple reconstitution de la force de travail), mais dispose d'un temps supplémentaire qu'il peut destiner aux «loisirs» («pêche, camping, bricolage, ménage», ou encore «sport, scènes de famille, adultères, cueillette de champignons, etc.»). «Une illustration de la bourgeoisie de surtemps: en Occident, le professeur moyen gagne généralement à peine plus qu'un ouvrier, mais sur un temps de travail journalier et annuel plus court. Une illustration de la bourgeoisie de surrémunération: le cadre des années 80 travaillait aussi longtemps