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Libération
Critique

Mon ami Perrault.

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Dans «le Goût de la vérité», l'auteur de romans policiers et militant antifasciste Didier Daeninckx instruit à charge sur son ex-camarade et écrivain-enquêteur Gilles Perrault. Sur fond rouge-brun, contre-enquête et entretien avec l'accusateur.
publié le 23 octobre 1997 à 10h00

C'est l'époque qui veut ça. On fouille, on accuse. Les Aubrac, des ministres. L'ère du soupçon a sonné. Cette fois, c'est dans l'édition qu'on se déchire. Didier Daeninckx, auteur de polars à succès, charge Gilles Perrault, enquêteur à succès. On les croyait pourtant amis, et Daeninckx rappelle qu'ils furent de plusieurs luttes communes, à gauche. On les croyait unis dans un même combat antifasciste, au sein de Ras l'Front, dont le texte fondateur fut rédigé par Perrault et ratifié entre autres par Daeninckx. On se trompait. La camaraderie tourne désormais à la lutte fratricide. Sur la couverture du Goût de la vérité de Daeninckx, un bandeau, lettres blanches sur fond noir: «Qualifier. Dénoncer. Combattre.» Le titre même renvoie directement au Goût du secret (1), un livre-entretien de Gilles Perrault, publié en juillet dernier.

Les accusations sont lourdes: après un an d'enquête, Didier Daeninckx dénonce un Perrault auteur de «nombreux dérapages banalisant la Shoah». Un Perrault qui, pour l'écriture de l'Orchestre rouge, s'est vu ouvrir les «archives ultrasensibles de la Gestapo» par un membre des services secrets français. Un Perrault candidat aux élections européennes (1994) avec des «fascistes flamands et alsaciens». Un Perrault «écrivain-enquêteur rigoureux» devenu «figure de la dissimulation». Et si l'on se penche sur l'objet, c'est que Daeninckx n'en est pas à son coup d'essai. Pourfendeur légitime au début des années 90 des rouge-brun (2), l'auteur de Meurtres pour mém