Ce livre est impressionnant. Construit comme un dictionnaire, en 1
300 articles, il rend compte d'une réalité révoltante avec des mots simples, une langue claire, analytique. L'auteur, Jacques Rossi, un Français né en 1909, a été un agent de l'Internationale communiste. En 1937, il a été rappelé d'une Espagne en pleine guerre civile où il était en mission et condamné à huit ans de camp de travail. Il y est resté vingt ans. Dans un certain sens, il a eu de la chance: ils furent en effet nombreux les agents de Staline en Espagne à avoir été exécutés sur ordre de leur maître dès leur rappel à Moscou. Pendant les années qu'il passa dans le système concentrationnaire soviétique, Rossi a observé son entourage, s'est intéressé aux mots qu'il entendait et a décrypté ce qui était pour lui la vérité du communisme. A son retour, il a décidé d'en rendre compte en écrivant d'abord un livre de souvenirs (1) puis ce Manuel, qui attendit de nombreuses années un éditeur avant d'être publié d'abord en russe (à Londres en 1987 et à Moscou en 1991), puis en anglais (USA, 1989) et en japonais (1996), et enfin aujourd'hui en français.
Toutes les entrées de ce dictionnaire sont à lire, mais il y en a de plus terribles que d'autres. «Exécutions massives» par exemple. Qui commence par: «Au départ les bolcheviks semblent croire à la justice sociale et au bonheur que leur dictature va apporter aux travailleurs.» Suit la longue liste des catégories d'exécutés. On commence en 1918 avec les cosaques de l'