Cela faisait vingt ans qu'elle vivait à la campagne, recluse dans
une ferme du XVIe siècle, mais elle ne supportait plus de rester loin de Londres, sa ville natale, dont elle connaît coins et recoins. «J'ai dû déménager près de quinze fois dans cette ville», dit Ruth Rendell avec un sourire plaqué sur son visage austère. «D'ailleurs, la plupart de mes romans s'y déroulent, et je me suis même payé le luxe d'inventer un quartier, Kenbourne Vale, où j'ai situé une des enquêtes de Wexford qui, lui, est provincial.» De façon paradoxale, en effet, le héros créé par la romancière en 1964 dans Un amour importun un petit flic de Kingsmarkham , ville également imaginaire du Middlesex, paraît totalement étranger à l'univers personnel de Rendell. Laquelle, afin de mieux brouiller les pistes, a lancé sur le marché le pseudonyme de Barbara Vine sous lequel elle a écrit dix romans dont Noces de feu, qui paraît en France sous le pseudonyme de Rendell. Aussi est-ce peut-être miss Vine qui, lassée de marcher de longues heures, chaque après-midi, dans la campagne du Suffolk, a mis en vente sa belle propriété pour s'établir à Londres dans une vaste demeure victorienne visiblement un ancien atelier de peintre pour s'y sentir enfin à l'aise. Les fenêtres des salons encore vides «Je suis désolée, nous n'avons pas eu le temps de meubler la maison» donnent sur le canal de Little Venice où sont amarrées des péniches, homes de la bohème artistique de ce quartier très chic. Dans le jardin qu