«Si scrive Roma, si legge amor» (On écrit Rome, il faut lire amour),
enseigne cette ritournelle d'une chansonnette italienne. Amor est d'ailleurs, selon une tradition très ancienne, le palindrome secret du nom de la Ville éternelle que les Romains eux-mêmes n'avaient pas le droit de prononcer. Sous le signe d'une semblable double attirance, savante et affective, Claudia Moatti publie deux livres, l'un sur la Rome disparue, l'autre sur la ville de nos jours, telle que l'ont façonnée l'histoire et le travail du temps. La Raison de Rome est un essai novateur sur le premier siècle d'avant notre ère. Au travers des bruits et des fureurs de la guerre civile et avant qu'elle ne s'effondre dans le régime impérial, la société romaine connaît alors une «révolution culturelle», avec notamment la naissance de l'esprit critique. C'est aussi l'avènement de la citoyenneté romaine, en tension permanente entre affirmation de l'universalité et maintien des particularités. Roma est un livre plus humoral,la traversée sans cesse recommancée d'un espace historique que bouleverse un temps réversible. Née en Algérie, ancienne élève de l'école française de Rome, Claudia Moatti est maître de conférences à l'université Paris I Sorbonne. Entretien.
Plus Rome monte en puissance, plus la société romaine semble se déliter. Pourquoi? Il n'a fallu qu'un siècle à Rome pour conquérir le Bassin méditerranéen. Cela s'est passé entre la première et la troisième guerre punique (264-146). Cette expansion, qui ass