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Libération

Expressions d'Afrique

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Fondée par Alioune Diop, la revue «Présence africaine» fête ses cinquante ans dans sa librairie de la rue des Ecoles. Histoire d'une entreprise qui a réuni presque toute l'intelligentsia noire, d'Aimé Césaire à Hampaté Bâ, en passant par Frantz Fanon et Edouard Glissant. Avec le soutien de Gide, Sartre, Camus et Leiris.
publié le 4 décembre 1997 à 15h05

La vitrine ne paye pas trop de mine et l'intérieur du magasin sent le poids des ans. Rue des Ecoles, entre Collège de France et université de Jussieu, la librairie «Présence africaine» célèbre discrètement ses cinquante ans. Avec ce mélange d'autorité et de nonchalance qui caractérise souvent la femme africaine, Christiane Yandé Diop règne sur les lieux. Depuis la mort de son mari Alioune Diop en 1980, elle lui a succédé à la tête de l'entreprise. Pour cet anniversaire, elle a choisi de rééditer trois des plus fameux numéros de la revue fondée en 1947 par son époux. Et depuis hier, se tient à l'Unesco le colloque du cinquantenaire: prix Nobel de littérature, l'écrivain nigérian Wole Soyinka a prononcé le discours d'ouverture, tandis qu'étaient lus des messages de Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire, Georges Balandier ou Théodore Monod.

Pour eux tous, comme pour beaucoup d'autres, «Présence africaine» a marqué en effet un tournant important dans l'histoire culturelle de l'Afrique. Lancée après-guerre par de jeunes intellectuels africains émigrés à Paris avec à leur tête Alioune Diop, la revue Présence africaine a cristallisé beaucoup d'énergie et de talents autour de son projet: contribuer au mouvement d'émancipation du continent noir en ouvrant un espace de création et de réflexion, au départ essentiellement francophone. Jusqu'à la mort d'Alioune Diop et dans l'euphorie des indépendances nationales, tout ce qui compte dans le monde intellectuel africain a transité par la rue