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Libération
Critique

Le pirate des Lettres. Un témoignage sur Alphonse Daudet par celui qui fut le précepteur de son fils et lui vola le manuscrit des «Lettres de mon moulin». Le Journal inédit de Louis-Pilate de Brinn'Gaubast, Préface et notes de Jean-Jacques Lefrère avec la collaboration de Philippe Oriol, Pierre Horay, 293 pp., 120 F.

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publié le 4 décembre 1997 à 15h07

C'est la lamentable histoire de l'un de ces petits auteurs entre

décadence et symbolisme qui a fait du ratage une oeuvre d'art et qui va devenir le plus grand tricard des lettres à cause de celles de «mon moulin». Louis-Pilate de Brinn'Gaubast naît en Louisiane le 11 avril 1865. A la mort de son père, sa mère le confie à son frère et à sa belle-soeur établis à Lille, dont il sera le souffre-douleur. Devenu jeune enseignant à Charleville, il rentre à Paris après un rapport défavorable. Il fréquente les réunions d'écrivains en compagnie d'Alfred Vallette, Rachilde, Gabriel Randon, futur Jehan Rictus. «Louis-Pilate de Brinn'Gaubast, un drôle de nom, un drôle de coco et un ami de ma jeunesse, écrira ce dernier dans son journal. «Il est sec, cassant, maigre, il a le nez qui tombe dans la bouche. (...) C'est le type de l'homme emmerdé.»

Le 6 octobre 1887, Brinn'Gaubast devient le précepteur du jeune Lucien Daudet et s'installe dans la propriété de l'auteur de Tartarin à Champrosay. Surnommé Clap ou Clafouti par la «délicieuse» petite soeur Edmée, il remplira cette charge pendant deux ans et laisse dans ce Journal un témoignage inédit et drôle sur un Alphonse Daudet en pantoufles. Brinn sera toujours plein de reconnaissance pour Daudet qui patronne ses débuts littéraires. En 1888, il publie simultanément un roman, Fils adoptif, et des Sonnets insolents. Mais ces débuts vont tourner au cauchemar. En juin 1888, Brinn a découvert à Champrosay les brouil lons des Lettres de mon moulin.